LES CHEMINOTS ET LA RECONSTRUCTION..
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Après avoir subi quatre années durant la mobilisation, l'arrivée massive des réfugiés, le retour des prisonniers, l'occupation, le S.T.O., les bombardements, après avoir eux même volontairement contribué à détruire leur outil de travail dans le cadre d'un plan coordonné pour empêcher les mouvements de troupes ennemies, après avoir perdu beaucoup des leurs, les cheminots Vauclusiens se retrouvent, au mois d'août 1944, face à une nouveau défi. Et il est de taille! Il faut maintenant remettre en service au plus vite le réseau des chemins afin de relever un pays ravagé par 4 années de guerre.
LA FIN DU CAUCHEMARD..
Après le débarquement en Normandie le 6 juin puis en Provence le 15 août, les armées alliées entreprennent la reconquête de la France.
Le 20 août 1944, les soldats qui ont débarqué 5 jours plus tôt dans le Var, parviennent déjà à Pertuis. Ils visent à encercler les armées Allemandes stationnées dans la région et à rejoindre la vallée du Rhône.
Avignon St. Ruf mai 1944...
Le 21 août, le dernier train du service commercial entre en gare d'Avignon. Il est en provenance de Nîmes et a mis plus de 22 heures pour parvenir à destination. Toute circulation ferroviaire est maintenant arrêtée. Seuls les trains spéciaux allemands se hasardent sur les voies. Le 23 les cheminots allemands encore présents à Avignon quittent la gare par l'une de ces circulations spéciales... Le 26, les troupes U.S. entrent en Avignon. La Provence est en passe d'être libérée.
Le 21 août 1944 toutes circulation ferroviaire est arrêtée. Le réseau ferroviaire en juin... D'aucuns le comparent à "une poignée de vermicelle concassé"... Le réseau ferré est exsangue...
Pour les cheminots une nouvelle "aventure" commence. Si la coexistence avec l'occupant allemand était difficile, celle avec le "libérateur" américain ne le sera pas moins. Les premiers contacts sont parfois rudes. Les soldats U.S. débarquent avec leur propre matériel ferroviaire et leurs équipes de conduite... Qui ne cohabitent pas facilement avec celles de la S.N.C.F.. Les "méthodes" sont souvent radicalement opposées. On pourrait même dire qu'il n'y a pas de méthodes du tout. A la guerre comme à la guerre, il faut passer, coûte que coûte... Un corps d'armée spécifique prend même les gouvernes des chemins de fer. D'autres fois des militaires se rendent coupables d'agissements peu scrupuleux dans les trains ou dans les gares. Tels ces soldats US qui, surpris en train de dérober des denrées alimentaires en gare d'Orange en décembre 1944, n'hésitent pas à molester le chef de gare... Mais bien vite la situation se normalise et chacun à parvient tirer parti des "forces" de ses co-équipiers. Le 30 août le service est rétabli entre Avignon et Cavaillon, par le train de 17 H 30. Le premier train de voyageurs circule en direction d'Orange, 8 jours à peine après la libération d'Avignon!..
Les libérateurs entrent en Avignon...
- | extrait de la revue "NOTRE METIER "n° 33 du 19 octobre 1945. La guerre est finie, nos transports reprennent, ils vont s'intensifier. Après avoir contribué à gagner cette guerre, nous devons maintenant montrer au public que nous sommes aussi capables de remporter la victoire en matière de transport. La première des conditions pour réussir, c'est à dire pour que la clientèle soit incitée à fréquenter nos trains et à nous confier ses marchandises, est de lui donner la certitude que les transports par fer se font en toute sécurité; Malheureusement, comme au lendemain de l'autre guerre, nous enregistrons un trop grand nombre d'accidents causés par l'inobservation des règlements et souvent même par des fautes contre les règles élémentaires de sécurité; sans doute ne s'agit-il que de défaillances individuelles, mais celle-ci sont trop nombreuses et il faut réagir vigoureusement malgré les difficultés de l'heure... Nous ne voulons pas énumérer ici toutes les prescriptions que les agents de tous les Services doivent observer pour assurer la sécurité, mais nous voulons attirer l'attention sur les causes les plus fréquentes des accidents intervenus depuis le début de l'année et dont certains même ont malheureusement été très graves. MECANICIENS! Respectez scrupuleusement les signaux; c'est la base même de la sécurité dans les chemins de fer; que l'absence momentanée d'appareils enregistreurs de vitesse et de signaux sur quelques machines ne vous incite pas - bien au contraire- à prendre des libertés avec les règlements de sécurité qui, pour vous, doivent être sacrés. AGENTS DE L'EXPLOITATION! Le respect de la marche à vue la nuit, par vos camarades de la Traction, ne peut être efficace que si les queues des trains sont munies de signaux allumés et bien visibles. La pénurie de lampes et de lanternes dont nous avons gravement souffert depuis la libération va s'atténuer progressivement; que chacun s'ingénie à ce que les queues de trains soient munies de feux réglementaires, avec des lampes consciencieusement garnies, propres et fonctionnant bien. Manœuvrez vos signaux dans les conditions réglementaires pour assurer la protection des trains ou des manœuvres; AGENTS DE LA VOIE! Veillez à la mise en place, au bon entretien et à l'éclairage des signaux, en particulier des signaux de chantier et des signaux de voies uniques provisoires.
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Ces 4 années cauchemardesques prennent fin dans le Vaucluse avec le mois d'août. Les blindés alliés pénètrent donc en Avignon le 26. Les occupants l'ont quitté, pour beaucoup par voie ferroviaire. Ils ont entraîné avec eux 5 wagons de prisonniers politiques et militaires et le dernier train de déportés, appelé le train fantôme.
LA RECONSTRUCTION DU DEPÔT D'AVIGNON...
Avignon est enfin libérée. Les cheminots se mettent sans trader à l'œuvre pour "relever" le dépôt. Il est fondamental de relancer l'activité au plus tôt, pour assurer les très importants transports de troupes, matériel et ravitaillement débarqués par les armées alliées dans les ports méditerranéens. Contre toute attente et grâce à l'efficacité des cheminots, les installations redeviennent rapidement opérationnelles. Des couvertures provisoires sont hâtivement installées sur les édifices bombardés pour garantir des intempéries hommes et machines. Il faut également remettre en fonctionnement nombre de machines outils avariées par bombardements et sabotages, ainsi que les 4 ponts tournants. Les réseaux d'adduction d'eau, de distribution d'électricité et d'air comprimé sont à rétablir, de même que les installations téléphoniques. Les locaux administratifs sont installés provisoirement dans une maison d'habitation, alors que 2 équipes sont engagées aux anciens ateliers d'Arles pour y assurer le levage des machines...
C'est cette tâche qui s'avère la plus délicate et la plus longue à réaliser. Il est en effet à cette époque très difficile de se procurer les pièces de rechange nécessaires. Mais les agents vont mettre tout leur cœur à cet ouvrage et, en janvier 1945, 25% seulement du matériel roulant reste encore hors d'usage. Une rotonde ainsi que des vestiaires provisoires sont rétablis en 1945. Début 1946, un vaste programme de reconstruction est lancé. Il prévoit l'édification de divers locaux administratifs et à l'usage des mécaniciens (en septembre 1946, les installations sanitaires sont déjà presque reconstruites) et d'une rotonde en béton ultra moderne. Outre le matériel il faut aussi s'occuper des hommes. Quatre cent cinquante cheminots d'Avignon sont sinistrés dont 340 pour le seul dépôt. Il est trés difficile de réunir l'ensemble du personnel, essentiellement le personnel roulant, car les hommes et leurs familles sont hébergés dans des familles des environs. Une commission "logement" est créée. Priorité est donnée au relogement des cheminots par l'administration. Les efforts de tous permettent le relogement de 300 d'entre eux en moins de 4 mois. Des meubles sont même fabriqués par les agents du dépôt! A l'instar de la maison pour 4 agents dirigeants et 4 agents de maîtrise, construite prés du dépôt en 1931, démolie partiellement en 1944 et reconstruite en 1948, la plupart des reconstructions se terminent peu avant le début des années 50.
Reconstruction de la rotonde du dépôt d'Avignon ... 1946... (Coll. S.N.C.F.)
Le dimanche premier décembre 1946, deux mois avant la date prévue, la reconstruction de la nouvelle rotonde "Ouest" est achevée. Elle est inaugurée en présence de nombreuses personnalités. Messieurs Auguste Lecoeur, sous secrétaire d'Etat à la production industrielle, Lucien Drevon préfet de Vaucluse, Gabriel Piron président du conseil général, Georges Pons maire d'Avignon, Etienne Charpier et Georges Laudun adjoints au maire, le colonel Dupleissier commandant du 7 éme génie, Jacques Pioline secrétaire général du P.C.F., Monsieur Cluchier représentant la préfecture, Sancelme représentant la police et bien d'autres, ainsi que 500 personnes, se sont retrouvés au 10 Heures au dépôt autour du chef d'établissement pour une minute de silence et dépôt de gerbes devant le monument aux morts, une visite de la rotonde et l'inauguration proprement dite. " C'est la conscience de la classe ouvrière qui lui a permis d'accomplir un tel prodige" s'est écrié M Lecoeur lors de son allocution...
Reconstruction des locaux administratifs du dépôt d'Avignon... 1947. (Coll S.N.C.F.)
LA RECONSTRUCTION DES INFRASTRUCTURES...
Le viaduc d'Avignon sur le Rhône, détruit en 1944 qui est remplacé provisoirement par un pont de bois sur pieux battus. Le Pont sur l'Ouvèze à Jonquières... Passage de la première machine d'essais après le relevage. Reconstruction du pont sur la Durance entre Pertuis et Meyrargues.
Le 8 mai 1945, l'Allemagne nazie capitule. L'un des conflits les plus terribles de l'histoire de l'humanité prend fin, pour l'instant au moins en Europe. Les L'activité normale reprend peu à peu ses droits, et chacun revient autant que possible à une vie "comme avant"... Mais le pays et le réseau ferroviaire sont dans un état de délabrement avancé, pis encore que celui laissé par la première guerre. Le chemin de fer a payé un lourd tribut à ces longues années de guerre. Le matériel roulant a été réquisitionné par les armées Allemandes et emporté hors de France, jusqu'en Russie parfois... Le matériel restant est "à bout de souffle" pour celui encore en état de rouler, le reste est irrémédiablement détruit. Les infrastructures, gares, ouvrages d'art sont en grande partie inutilisables. Quant au personnel s'il ne manque pas de courage il est affaibli par ces longues années et réduit en nombre (8 938 morts et 15 977 blessés dans les rangs de la S.N.C.F.). Les finances de la S.N.C.F. comme celle de l'Etat sont exsangues... Mais les cheminots vont s'atteler à cette incommensurable tâche et remettre avec une rapidité exemplaire le réseau en état de fonctionnement. Le rail est le seul moyen de transport de "masse" permettant au pays de se relever de ses cendres.
Un des bâtiments de la cité P.L.M. d'Avignon.. en 1944 et lors de sa reconstruction en 1947.
Il faut recenser le matériel qui peut encore être réparé ou utilisé, dégager les éléments totalement inutilisables. Dans les grands ateliers et les dépôts, il faut créer des installations de fortune pour mettre "hors d'eau" les machines-outils encore en état, en attendant la remise en place des toitures. Mais la pénurie de tuiles et autres matériaux de construction retarde la réparation des bâtiments et du matériel. Des "émissaires" sont envoyés aux 4 coins du département pour recenser toutes les possibilités d'achats de matériel, outillages et matériaux de construction. Les équipes de la voie et de la signalisation doivent veiller à rendre les plates-formes et les installations de sécurité fonctionnelles le plus rapidement possible. Souvent, dans les zones les plus touchées, une seule voie est rétablie. Les troupes Américaines et même les prisonniers Allemands sont employés sur ces chantiers.
La réparation du viaduc d'Avignon sur le Rhône est confiée à l'entreprise Daydé (architecte Bastien) de Paris. Elle débute en janvier 1946. Un début de relèvement avait été effectué dés le 1 er mai 1945. Pour permettre la circulation vers le Gard, un pont en bois, sur pieux battus est mis en place le 8 janvier 1945, placé une vingtaine de mètres en aval du viaduc détruit. Le pont reconstruit est mis en service le 10 novembre 1947. Une seule voie est ouverte à la circulation, la seconde est ouverte 3 jours plus tard. Le cas du viaduc sur la Durance est légèrement différent. Utilisé pour la circulation routière par les allemands en retraite puis les américains (des "tanks" ont circulé directement sur... la voie ferrée!!), il n'est remis en service normal qu'à partir de 1949. Un plan de reconstruction est prévu dés 1944, mais les travaux confiés à l'entreprise Drouard de Marseille ne débutent qu'en septembre 1945 (le platelage bois est réparé en 1944, par les pionniers U.S.). Les principales brèches sont réparées en 1947/1948, mais le platelage de bois destiné aux véhicules automobiles doit rester en place jusqu'à la réouverture du nouveau pont de Rognonas. Ceci ne va pas, l'on s'en doute, sans une forte gêne à la reprise du trafic S.N.C.F. en direction du sud. Aussi une demande est elle déposée dés le 23 septembre 1945 en vue d'obtenir l'interdiction de circulation des véhicules. Mais le pont suspendu de Rognonas n'est pas encore reconstruit et les moyens de franchissement de la Durance ne sont pas légion. Une demande d'installation d'un platelage en bois et la création de rampes d'accès au viaduc d'Orgon est à nouveau proposée. Cette demande avait déjà été déposée en décembre 1944 mais avait été repoussée par l'état major U.S.. Cette installation, d'ailleurs partiellement réalisée, aurait nécessité l'approvisionnement de 560 à 700 m3 de bois, 110 Tonnes d'acier pour un coût estimé de 14 millions de Fr.. C'est finalement un pont provisoire en bois sur pieux battus qui est construit... Mais le 3 novembre 1945 les crues de la Durance emportent ce faible édifice... Quant au viaduc d'Avignon-Barbentane, il poursuit donc sa carrière "mixte". Des réparations sont effectuées sur le platelage bois en 1948, par l'entreprise Mouret, puis il est définitivement déposé en 1949 par l'entreprise Jallut-Verger. Les matériaux récupérés sont stockés dans la halle de Barbentane en attente de décision de l'Etat Major. Le bois est enlevé définitivement de ce lieu de stockage en 1951...
Reconstruction de la halle mécanisée de la gare des marchandises d'Avignon Chamfleury en 1947. (Coll S.N.C.F.)
LES TRANSPORTS DU "REDEPLOYEMENT"...
D'autre part, dés la cessation des hostilités, l'état-Major Allié se trouve confronté à un gigantesque problème de logistique; "comment regrouper les troupes Américaines disséminées sur une grande partie de l'Europe, pour les diriger rapidement sur les théâtres des opérations d'extrême Orient ou les rapatrier aux U.S.A.?". Cette formidable opération, essentiellement ferroviaire, doit s'effectuer alors que la S.N.C.F. ne dispose que de moyens fortement amoindris. Pourtant, grâce aux efforts et au dévouement de tous, les "transports de redéployement" sont effectués dans les délais impartis. Entre juin et novembre 1945, la S.N.C.F. met en route prés de 900 trains, pour assurer le transbordement de 900 000 voyageurs! L'un des centres de rassemblement ayant été installé sur Marseille, de nombreuses rames marquées "Allied Forces" ont, selon toute probabilité, emprunté les lignes Vauclusiennes.
DU COURAGE, MAIS BEAUCOUP DE DIFFICULTES...
Le chemin de fer est le fer de lance de la reconstruction. Aussi, par le décret du 1 septembre 1944, le temps hebdomadaire de travail des cheminots, qui était de 40 heures depuis les lois du Front Populaire ( 21 juin 1936) est modifiée: La durée légale du travail des agents de la S.N.C.F. reste fixée à 40 heures par semaine. Toutefois, eu égard au rôle essentiel des chemins de fer dans l'économie française et aux tâches particulièrement lourdes résultant des destructions de guerre, la durée normale du travail est fixée à 48 heures par semaine. Une situation compréhensible et acceptée par les cheminots mais qui va perdurer bien au delà de la période d'après guerre et sera à l'origine de nombreux et forts mouvements sociaux.
Reconstruction d'un poste d'aiguillage en gare d'Avignon en 1947. (Coll S.N.C.F.)
Il reste que le matériel et les infrastructures sont particulièrement usés et le charbon manque cruellement. C'est ainsi qu'en 1948, une réduction massive des kilomètres/trains de -20% est mise en place. C'est aussi à cause de cela qu'un train déraille le 21 juin 1946 à 500 mètres de la gare de Courthézon coté Avignon. la rupture d'un essieu est à l'origine du sinistre qui, s'il n'a provoqué aucun dégât corporel, a provoqué d'importants dégâts matériels. Le 20 novembre 1946 à l'Isle/Sorgue, par suite de la rupture d'un essieu, une dizaine de wagons obstruent les voies... Détériorées sur 500 mètres. La V1 est rendue à la circulation dans la journée. La V2 nécessite plusieurs jours de travail avant d'être rendue à l'exploitation. Le 30 novembre, à 2 H du matin, c'est en Avignon que le train de voyageurs Nice/Genève déraille sur V2 au P.K. 742.700 par suite de la rupture d'un rail. Quatre voitures situées en queue de train sortent des rails, mais aucun blessé n'est à déplorer. Le trafic est dévié sur Rive droite, alors que la grue de secours de 50 T du dépôt est utilisée au relevage. Le 3 avril 1947, un autre convoi quitte la voie à 200 mètres au sud de la gare d'Orange... Il est 1 H 04 lorsque le train sort de ses rails, parcourt encore 300 mètres arrachant au passage de nombreuses traverses et... La marquise de la gare! Heureusement à cette heure là il n'y a personne sur les quais. Aucun blessé n'est à déplorer.
LES DIFFICULTES SOCIALES ...
La guerre est enfin terminée, la vie normale peut reprendre ses droits... Mais si les cheminots se sont massivement mis au travail pour relever le pays, la situation sociale de cette période d'après guerre reste difficile....
Le syndicat cheminot est reconstitué dés septembre 1944. Des activités militantes sont immédiatement reprises. Le club des cheminots organise par exemple des journées commémoratives et des meetings d'information (en mars 1948, par exemple, pour la semaine commémorative de la mort de P. Sémard, des projections de films sont organisées pour les cheminots et leurs familles. On projette, bien évidement "La bataille du Rail").
Mais la vie en général et la vie cheminote en particulier n'est pas facile. Les hommes s'attellent avec courage aux incommensurables travaux de déblaiement et de reconstruction. Beaucoup ne comptent pas leurs heures de travail. Certains viennent au dépôt en dehors de leurs heures normale et même les dimanches. La fin des combats ne signifie pas pour autant la fin des restrictions alimentaires. La pénurie de nourriture implique la continuation des mesures de rationnement et l'utilisation de cartes jusqu'en 1949, officiellement... Les cheminots sont soumis aux mêmes conditions que les autres catégories de personnes, tout au plus certains, suivant leur emploi, touchent ils des rations légèrement supérieures étant classés comme des travailleurs de force. L'année 1947 est la plus difficile dans ce domaine. Aussi, le mardi 23 décembre 1947, un convoi pour le moins particulier est reçu en gare d'Avignon accueilli par la musique militaire du 7e génie ainsi qu'une importante représentation de personnalités, des enfants des écoles. Ce convoi n'est autre que "le train de l'amitié".
En 1948 de nombreux cheminots manquent encore à l'appel... Prisonniers, déportés, STO, ils ne sont pas rentrés et, malgré les actions menées par les autorités ou la Croix Rouge, il semble difficile de retrouver leurs traces.
Les syndicalistes ne restent pas les deux pieds dans le même sabot et créent, en 1947, une coopérative de produits de consommation et une coopérative d'entraide. Bien que présentant à priori quelques dysfonctionnements, ces organisations proposent aux cheminots des produits à prix attractifs. Quant aux cheminots ayant la chance de posséder des liens familiaux à la "campagne", ils n'hésitent pas à utiliser leurs facilités de circulation pour aller chercher à l'extérieur la nourriture qui fait défaut dans les centres urbains...
Souvenir de la guerre encore toute proche, un train blindé allemand est exposé en gare d'Avignon fin décembre 1949. Ce train n'est autre que celui qui a servi aux prises de vue du film "LA BATAILLE DU RAIL". Ce convoi possède une histoire peu banale. Capturé aux armées Autrichienne en 1918, il a été repris par les soldats du Reich durant la seconde guerre mondiale et servi à la protection de leurs convois. Il est capturé à nouveau en 1944, par les troupes Françaises à Chagny. Ce train, comprenant en tête et en queue un wagon spécial transportant un canon automoteur, des wagons forteresses, un poste de commandement, un wagon servant de cuisine, des wagons servant de magasin à vivres et à munitions (la locomotive, ce trouve placée au milieu du train) est proposé à la visite au public durant quelques jours... Nous ne savons pas aujourd'hui si ce train a été sauvegardé ou détruit par la suite.
L'Etat doit réaliser des économies. Durant le conflit, un "ennemi" du chemin de fer a "profité" de la situation pour étendre son emprise; le transport automobile et dans une moindre mesure le transport aérien. Malgré les efforts considérables consentis par le chemin de fer, les gouvernements libéraux qui se succèdent dans cette instable période d'après guerre tentent, à diverses reprises, de sacrifier le rail à la route.
C'est aux entreprises nationalisées et au chemin de fer en particulier que sont demandés les plus grands sacrifices. Les premières suppressions définitives de lignes secondaires peuvent être entreprises alors que la coordination des transports leur avait déjà enlevé, avant guerre, leur trafic voyageurs.
Tout cela va ouvrir la voie à de nombreux mouvements sociaux et au début du démantèlement du réseau ferré Vauclusien. La reconstruction rime aussi avec rationalisation. C'est la ligne de Pierrelatte à Nyons qui est fermée, puis celle d'Orange au Buis...
LE RENOUVEAU DES BUFFETS DE GARES...
Ces années d'après guerre se veulent également celles du renouveau... Des buffets de gares. En 1950, en même temps que se reconstruisent les infrastructures et que prennent fin les restrictions, la S.N.C.F. donne un "nouveau départ" aux buffets de gares. Les temps ont changé. Les goûts et habitudes de la clientèle également. Le transport routier est maintenant un concurrent acharné au transport ferroviaire et la restauration dans les trains est devenue plus habituelle. Jules Antonini (secrétaire général nommé en 1948), outre brillant administrateur est également ... président de l'académie des gastronomes. Il souhaite donner aux buffets les moyens de reconquérir la clientèle touristique. Il lance la campagne des "buffets gastronomiques".
LE RENOUVEAU DU MATERIEL ROULANT...
A l'égal des infrastructures le matériel roulant à la libération est dans un bien piteux état. Les cheminots Vauclusiens, comme nous l'avons vu, se mettent aussitôt les installations libérées, en quête de matériel et de pièces pour réparer ce qui peut l'être. Mais le nombre de locomotives et de wagons disponibles reste très faible, eu égard aux destructions et aux réquisitions subies durant la guerre. Les Allemands n'ont laissé à la S.N.C.F. que du matériel hors d'âge ou de séries disparates. Il est donc essentiel, afin de faciliter la reconstruction du pays, de mettre en service du matériel neuf et robuste... C'est vers l'industrie nord Américaine, seule à même de fournir ce matériel en quantité et délai, que s'est tourné de gouvernement provisoire, avant même le lancement de l'offensive de libération...
La 141 R 420, l'une des quelques unités préservées (Photo J L Bezet)
Il serait donc impossible d'évoquer la traction vapeur sans parler des MIKADO de la série 141 R. Machines à tout faire, simples de conception et d'utilisation elles ont été construites aux Etats-Unis et au Canada alors que la guerre sévissait en Europe. Elles ont été livrées en France dés la libération. Débarquées dans plusieurs ports, dont celui de Marseille (première machine débarquée à Marseille 17/11/45), elles sont mises en service le plus rapidement possible après leur affectation. Avignon en reçoit une dotation importante. Fortes de plus de 1 300 exemplaires elles vont être omniprésentes et assurer par leur concours le redémarrage de l'économie du Pays. Elles seront aussi les dernières à quitter la région... Il est à noter que de nombreuses machines affectées à la région (6)Méditerranée seront équipées pour être chauffées au fuel lourd et non au charbon.
D'autres machines comme les 030 TU ainsi que des milliers de wagons seront également importés dès la libération.
La 030 TU du chemin de fer de Provence... Une survivante d'une époque troublée ayant pris part au débarquement de Normandie!
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- Archives INA " La bataille du rail"
- Archives INA "Pierre Sémard".
- Archives INA "Anniversaire de la libération"
- Le viaduc d'Avignon.
- La rotonde d'Avignon.
- Revue NOTRE METIER 1947 (lire article Page1 / page 2)
- Vidéo Youtube
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- Libération et reconstruction.
- Libération et reconstruction.
- Revue Générale des Chemins de Fer N° 5 - 1992 (reconstruction de 1942)
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NB: Les illustrations sont issues de la collection de l'auteur (Photos S.N.C.F. pour le dépôt, Capdeville, JL Bézet, AD Vaucluse). Quelques images tirées d'un film S.N.C.F. ancien ont été également insérées ainsi qu'une affiche trouvée sur internet.
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