LES TRAINS DE PRIMEURS EN VAUCLUSE
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Le marché des fruits et primeurs représente une part importante de l'économie de la vallée du Rhône. Terres fertilisées par les alluvions du Rhône et de la Durance, climat exceptionnellement clément, irrigation, autant de raisons qui, conjuguées à l'essor du transport ferroviaire, ont permis le développement des cultures maraîchères et fruitières en Provence.
S'il existe de nombreuses conserveries et confiseries, qui ont en leur temps procuré de forts tonnages au rail, le majeure partie des produits agricoles du terroir Provençal doivent être expédiées quotidiennement vers Paris et les pays Européens. Mais ce sont des denrées périssables supportant difficilement de mauvaises conditions de transport ou des stationnement prolongés à la chaleur durant le cycle d'expédition.
Dés l'origine, les Cies. de chemin de fer ont tenté de trouver des solutions satisfaisantes pour traiter dans les meilleures conditions possibles ce type de transport. Le chemin de fer à lui tout seul a constitué la première révolution. On peut imaginer qu'avant l'avènement du rail, le transport des fraises, cerises, melons, vers les grandes agglomérations ne pouvait être possible avec la célérité nécessaire.
Les balbutiements.
A l'origine, l'offre ferroviaire n'est pourtant pas en adéquation avec la demande des expéditeurs. Si le rail permet des vitesses élevées, les Cies. ne disposent pas d'assez de matériel roulant adapté. La "trilogie" classique des wagons "couverts", "plats" et "tombereaux" ne suffit pas à assurer des conditions optimales au transport des primeurs. De plus, la demande étant essentiellement saisonnière le nombre de wagons pour ce service ne peut être suffisant. C'est ainsi que les expéditeurs Vauclusiens ne cessent, au début du siècle dernier de déposer des réclamations auprès du P.L.M. (première Cie. s'étant intéressée directement au transport des primeurs, dès 1872). Wagons inadaptés, en nombre insuffisant, retour des banastes non assuré, manutentions trop lentes par manque de personnel saisonnier ou au contraire trop fréquentes dans les trains indirects... L'affaire est entendue, il faut réagir. Outre des modifications d'horaires et d'organisation (le P.L.M. se dote à Avignon en 1900, d'un inspecteur chargé de développer le trafic des primeurs) c'est aussi sur le matériel roulant et les conditions de route et de stockage que les Cies. accentuent leurs efforts.
La gare du Thor en pleine activité d'expédition de primeurs... Noter l'utilisation de "banastes" et la présence de "camions". Nous sommes probablement entre les 2 guerres...
C'est au début du siècle que des essais de "wagons glacières" sont effectués. Mais ils ne conduisent pas à l'utilisation "massive" de ces wagons qui restent réservés essentiellement au produits laitiers, marées et viandes, sur d'autres Cies.. Tout au plus, le P.L.M. se contente-t-il de faire modifier des wagons couverts pour adjonction de ventilations (en 1904, type Faf). La fraîcheur de la nuit et la bonne ventilation des wagons semble suffisante pour assurer la conservation des denrées.
Pourtant, la France est un pays réceptif aux progrès... C'est donc à Paris que se réunit, en octobre 1908, le 1er congrès international du froid (Notons que c'est un Français, Charles Tellier, "surnommé le père du froid", qui a défini la technique du froid artificiel vers 1850!). C'est encore à Paris que le 25 janvier 1909, est créée l'association internationale du froid. Elle émet le jour même le désir de voir rapidement implanté dans une gare importante du territoire, un établissement dédié au refroidissement des denrées et wagons. C'est la gare de Châteaurenard (Bouches du Rhône) qui est choisie, devançant de peu celle de Carpentras, pourtant siège d'un entrepôt de la société des magasins et transports frigorifiques. Installation inaugurée le 20 juillet 1910.
En 1912, le P.L.M. crée le "service agricole", basé à Paris, œoeuvrant en relation étroite avec le ministère de l'agriculture. Celui-ci assure, entre autres, la formation des exploitants agricoles et des expéditeurs (et leur acheminement gratuit vers les centres de formation). En aidant au développement de méthodes modernes d'agriculture, logistique, emballage (utilisation des cagettes au lieu des banastes), transport, en aidant directement au transport voire à l'achat de produits phytosanitaires (ce fût le cas pour les produits de traitement des vignobles après la crise du phylloxera) ou fertilisants, plants, sarments, semences, la Cie. entend bien, indirectement, s'assurer de futurs courants de trafics fort importants. Le service agricole se charge également, de l'organisation de voyages d'études pour les expéditeurs vers leurs marchés de consommation, pour les clients étrangers vers les centres de production et d'expédition français et se charge de favoriser les rencontres entre producteurs, acheteurs, industriels du machinisme agricole.
Malgré les progrès réalisés, la France ne possède, au seuil de la grande guerre, que de moins de 400 wagons réfrigérés. Mais même leur nombre croissant ils ne détrôneront pas les wagons à primeurs classiques (4 200 au 01 janvier 1928 + 860 wagons à bogies Fay. Certains d'entre eux seront même modifiés (1934) pour le trafic "FERRY" avec la Grande Bretagne. Mise au gabarit réduit, ajout du frein à vide, d'anneaux d'arrimage pour le ferry... type Fagu). D'autres modèles, de plus grande capacité, seront aussi construits sur des bases anciennes, au début des années 30 (près de 3 000 wagons Fau). Les coûts engendrés par le transport sous température dirigée, sont encore trop élevés.
Durant la guerre, les autorités se trouvent confrontées à la nécessité de conserver des viandes et produits congelés, pour les populations et l'armée. Elles poussent donc activement à la construction de vastes dépôts frigorifiques, dans les ports d'importation. Mais au delà de la conservation se pose toujours le problème du transport vers les lieux de consommation. Il en est de même pour les produits agricoles.
L'arrivée des transports frigorifiques.
C'est après la première guerre que le transport frigorifique commence à se structurer. C'est une absolue nécessité pour l'agriculture française et pour le chemin de fer car la concurrence étrangère se développe (surtout italienne). Le 4/08/1919, présidant la commission pour l'étude des transports de ravitaillement pour la France et l'Europe, le ministre des Travaux Publics demande aux diverses Cies. de constituer des sociétés spécialisées dans le transport, frigorifique et l'entreposage des denrées périssables. Après quelques mois de réflexion et d'études, c'est le P.L.M. qui lance le premier, le 12/05/1920, une société spécifique, la S.T.E.F. (Société de Transport et d'Entreposage Frigorifique). Un service "technique" y est créé, prenant en charge les études de matériel roulant. Sous son impulsion, des wagons spécifiques sont aménagés. Ils deviennent bientôt "isothermes" ou "frigorifiques" et se comptent à près de 400 unités. En parallèle, des wagons couverts à bogies, issus du parc de matériel importé par les troupes U.S. et que se sont partagés les diverses Cies. françaises, sont spécialement modifiés pour le transport des primeurs en RA*: Ventilations, frein Westinghouse (réservé au matériel voyageurs), modification des organes de roulement permettant une augmentation de la vitesse. Il reste que le transport en général et le transport ferroviaire en particulier, sont totalement désorganisés dans les premières années de l'après-guerre: Matériel et infrastructures en mauvais état, personnel absent... Les expéditeurs se plaignent des difficultés à obtenir des wagons freinés (pour leur intégration dans les trains de messageries), voire tout simplement à obtenir des trains!
Le chantier S.T.E.F. Avignon dans les années 50. Seulement 2 Tours de glaçage sont en place. Dans le fond, le triage de Fontcouverte et en arrière-plan les champs! Aujourd'hui tout cela est une vaste zone industrielle...
Photo collection S.T.E.F. Avignon
Pour le moment, heureusement, le transport routier n'est qu'embryonnaire, lent, peu sûr. Le rail enlève la quasi-totalité des trafics. Peu à peu les transports reprennent et le P.L.M. doit réaménager les gares expéditrices importantes: Cavaillon, Gadagne, L'isle/Sorgue, le Thor (Adjonction de voies de remisage, de débord, de formation des rames, voire création d'une site complet comme la gare dite "du Maroc" au Thor). Les tonnages sont tels que dans les années 30 une partie du triage d'Avignon se substitue au triage spécialisé de Châsse/ Rhône. Ces changements d'organisation testés en 1934, permettent un accroissement de la vitesse et donc des départs plus tardifs des lieux de production pour une arrivée sensiblement équivalent sur les lieux de consommation. En plein été, le nombre de trains expédiés (et reçus pour le retour des "vides") quotidiennement est impressionnant. Record battu avec la batterie du 21/08/1935... 13 trains au départ d'Avignon entre 20 h 00 et minuit (un train toutes les 15 minutes!), soit 380 wagons représentant 2 000 T de primeurs. Parmi ces 13 convois, 10 allaient avoir un parcours de plus de 600 km sans remaniement en route!
Parallèlement, la S.T.E.F. développe son parc de wagons et implante des centres de glaçage et de stockage. En mai 1936, un centre S.T.E.F. est implanté à Avignon, embranché au triage de Fontcouverte. Il comprend de nombreuses voies de garage, une usine à pains de glace et une dizaine de chambres froides. Le P.L.M. continue à favoriser le commerce (et donc le transport) des fruits et primeurs et organise, par exemple, en 1936, la visite de clients potentiels Anglais, journalistes et représentants des Chemins de fer d'outre-manche, pour une visite des producteurs et infrastructures de transport. Ils visitent, entre autres, les installations de la S.T.E.F. d'Avignon et rencontre des producteurs et expéditeurs à Carpentras et au Thor. Afin de favoriser la consommation de raisins, des stations uvales sont créées en diverse villes dont Le Thor, Entraigues et Avignon. Les consommateurs peuvent y effectuer des cures à base de raisin. Le P.L.M. s'implique dans la publicité autour de ces cures uvales car, bien entendu, intéressé par les transports de raisins de table voire des curistes.
Puis survient la nationalisation et la création de la S.N.C.F.. C'est dans ce cadre qu'échoit à la S.T.E.F. la gestion de la totalité du parc des wagons réfrigérés, le 1 janvier 1940. Elle se trouve à la tête de plus de 3 000 véhicules. Mais les conséquences du conflit naissant provoquent rapidement d'importantes limitations des transports (désorganisation des réseaux, matériel perdu ou détruit, trains militaires, etc.) et réduisent les tonnages transportés sous température dirigée. Cette situation ne fait qu'empirer avec l'avancement des troupes d'occupation et l'envahissement de la zone libre. Puis les bombardements de 1944 finissent d'anéantir le site avignonnais. Le bilan à la libération est lourd. Alors que le transport de marchandises doit être relancé pour faire face à la pénurie de denrées alimentaires et réactiver l'industrie et l'agriculture, 278 wagons de la S.T.E.F. sont détruits, 266 ont disparu, 250 sont fortement avariés, quant au parc des wagons à primeurs il n'est pas plus reluisant. Le port de Marseille étant une important voie d'accès pour les marchandises importées, le personnel des régions du sud vont mettre toute leur énergie pour rétablir au mieux la situation. Outre les denrées périssables pour lesquelles ils sont prévus, les wagons réfrigérés en état de rouler sont même utilisés à des transports divers. Quant au site de Fontcouverte, il est rapidement reconstruit, modernisé et étendu. Une nouvelle installation, prototype, de glaçage au-dessus des voies y est créée en 1950. Elle est équipée d'un matériel américain tout à fait nouveau, capable de produire 30 T de briquettes de glace par jour. C'est ici qu'apparait la première des 4 tours de glaçage. Le transport des fruits et primeurs et dès lors relancé.
L'apogée.
Mais au détour de la seconde guerre, le monde a évolué. Le transport routier est désormais un concurrent réel au transport ferroviaire. La S.N.C.F. qui perd peu à peu sa position dominante dans le transport des primeurs réagit et crée, au début des années cinquante, un train dédié exclusivement à ce type de transport en régime accéléré. Ce train dit "de première desserte", connu sous l'appellation de "FLECHE DES HALLES", relie Avignon et Paris-Bercy en 11 heures 15' (départ 11h00 arrivée 22h15). Les envois diffus en provenance de la ligne de Cavaillon ou des Bouches du Rhône sont regroupés sur Avignon. Un dernier "ajout" est effectué à Orange pour les expéditions de la ligne Orange-l'Isle. Pratiquement négligeable sur cette relation "de jour", la concurrence du transport routier devient au fil du temps de plus en plus intense. Le réseau routier se densifie, les camions se modernisent.
Pourtant, certains producteurs comtadins vont même utiliser les trains rapides pour expédier leurs fraises à Paris. Il est possible de voir, en 1952 sur le quai de la gare d'Avignon, des ouvriers chargeant jusqu'à près de trois tonnes de fruits en trois minutes dans le fourgon à bagages du "MISTRAL"!! Le record en la matière est réalisé en 1949 avec le chargement de 10 200 Kg en 7 minutes dans le fourgon d'un rapide... Le rail est alors le seul moyen de transport permettant une telle célérité. En 1952, une seconde tour de glaçage est implantée sur le site S.T.E.F. d'Avignon. La capacité de production du site devient la plus importante de France avec 90 T de briquettes par jour sans compter les 90 T de pains de glace!
Continuant son effort, profitant de l'électrification de l'artère impériale, la S.N.C.F. propose en 1960, à sa clientèle d'expéditeurs de retarder d'une heure environ le départ depuis les centres d'expédition, pour une arrivée sensiblement identique à destination. (Départ Avignon 12h00, Arrivée Paris Bercy 22h30). Mais cette amélioration, pourtant significative, ne suffit pas à enrayer le report des expéditions du rail à la route, les transporteurs routiers continuant à proposer des départs encore plus tardifs. La S.N.C.F. réagit donc dès la campagne 1961. Le schéma est totalement revu et corrigé. Le point central de regroupement et d'expédition est reporté d'Avignon à Orange. Les envois issus des Bouches du Rhône, sont regroupés à Tarascon puis dirigés directement sur Orange. Quant aux envois de la région de Cavaillon, ils ne marquent plus l'arrêt dans les installations de la cité papale, tout juste les traversent ils pour la desserte du marché gare de Fontcouverte. Le matériel roulant est lui aussi transformé. Des wagons couverts d'un modèle récent (près de 300) sont affectés uniquement à ce train, qui est désormais dénommé "PROVENCE EXPRESS". L'ensemble est expédié en marche accélérée, sans arrêt sauf une escale technique pour changement de l'équipe de conduite à Dijon, jusqu'à Paris-Bercy. Le trajet est effectué en 8 heures et 6 minutes ce qui permet de retarder le départ de près de 2 heures. Une large campagne d'information est effectuée auprès des clients potentiels et, le 27/03/1961, le premier "PROVENCE EXPRESS" s'ébranle des quais Orangeois. Le train est aisément reconnaissable. Tous les wagons sont munis d'une plaque signalétique apposée sur la porte latérale, frappée du sigle "PROVENCE EXPRESS" peint en lettres vertes sur fond blanc.
Le "PROVENCE EXPRESS" à pleine vitesse, file vers Paris.
Carte postale éditions La Vie Du Rail.
L'opération est un véritable succès. Plus de 5 000 wagons sont expédiés la première année, pour un tonnage de 56 987 Tonnes! L'augmentation du trafic avoisine les 43% entre 1960 et 1961! Notons, au passage, que le "PROVENCE EXPRESS" est détenteur du ruban bleu des trains de marchandises d'Europe. Fiers de cette réalisation prestigieuse, les cheminots organisent diverses manifestations à la "gloire" du PROVENCE EXPRESS. Certains vont même jusqu'à lui composer une chanson sur un air en vogue... (que nous n'avons pu identifier). Forte de son succès, la S.N.C.F. apporte de nouvelles améliorations, dès l'année suivante. Le "PROVENCE EXPRESS" 1962, reste un bon cru. Des essais effectués avec les wagons jusqu'à 120 km/h ont permis de démontrer leur possibilité de circuler à de telles vitesses. Le 9 avril, une nouvelle marche est tracée à la vitesse limite de 120 km/h. Cette importante évolution permet de réduire le temps de parcours à 7 heures 20 minutes. Par ailleurs, en mai 1961, le premier TRANS EUROP EXPRESS MARCHANDISE est créé. A l'instar des T.E.E. voyageurs, les T.E.E.M. sont destinés à faciliter les échanges internationaux entre centres de production et centres de consommation. En mai 1962, plusieurs relations viennent compléter l'offre, notamment une relation Avignon-Duisbourg via Apach. Cette importante organisation n'est qu'une des composantes du programme mis en place pour assurer dans les meilleures conditions possibles l'acheminement des primeurs. Il est en effet expédié depuis les départements du Vaucluse et des Bouches du Rhône, et ce durant près de 8 mois par an, des abricots, cerises, fraises, pêches, poires, raisins, asperges, aubergines, aulx, oignons, choux, carottes, navets, épinards, haricots, poireaux, tomates, salades, pommes de terre... Cette organisation basée sur un système de "dessertes" consiste à proposer une heure de départ optimum aux expéditeurs, en fonction de leurs impératifs de cueillette et de conditionnement, mais aussi fonction de la destination finale du produit.
Quatre dessertes sont prévues quotidiennement. La première, entre fin de matinée et début d'après-midi, permet la livraison (rayon n'excédant pas 600 km) des denrées pour le marché du lendemain. Elle est la plus contraignante pour les expéditeurs du fait de l'heure avancée de départ. La seconde n'assure que le ravitaillement de la capitale. Le "PROVENCE EXPRESS" en est le maillon essentiel. La troisième, permet des départs des centres expéditeurs entre 18 et 21h. Elle autorise la livraison pour le surlendemain, sur les marchés Normands ou Bretons, mais aussi Allemands. Les T.E.E.M. assurent cette desserte. La dernière, enfin, avec un départ tardif, assure les livraisons pour le marché du surlendemain à Paris, dans les régions du Nord et la Belgique, ainsi que la Normandie et l'Est de la France.
En lisière du triage de Fontcouverte, est inauguré le 4/07/1960, le tout nouveau Marché d'intérêt National d'Avignon. Ces installations, modernes, remplaçant l'ancien marché traditionnel, avaient été imaginées dès 1952. Elles sont, bien entendu desservies par un embranchement particulier du triage. La vocation agricole de la région avignonnaise et comtadine, ainsi que l'important transit de produits maraîchers avaient imposé l'installation de cette plateforme ultra moderne. La proximité du centre de glaçage de la S.T.E.F. avait, par ailleurs joué en faveur de l'installation du M.I.N. sur ce secteur. Installations de glaçage qui sont, de fait, agrandies avec la construction d'une nouvelle tour.
C'est en 1962, qu'est également mis en service un M.I.N. à Cavaillon. Situé au sud de l'agglomération, embranché sur la ligne Avignon-Salon-Miramas, il remplace les anciennes installations du centre-ville. La part belle est donnée aux transports ferroviaires. La S.N.C.F se limite à la mise à disposition de matériel, manoeuvré dans les emprises du marché gare par du personnel et du matériel de la régie du M.I.N.. Cavaillon est, il ne faut pas l'oublier, l'un des centres principaux d'expédition de produits agricoles et la "capitale" du melon... Quant aux wagons "blancs" de la S.T.E.F., ils passent par centaines sous les tours de glaçage de Fontcouverte pour y faire le plein de "froid". Certains jours d'été la demande de glace est telle que les installations n'y suffisant plus les wagons sont dirigés vers d'autres gares. Certains partent à Carpentras. Ils y sont chargés de pains de glace fabriqués par la Société des Glacières de Paris.
L'année 1973 est exceptionnelle en terme d'expédition de fruits en gare d'Orange. En marge de la campagne "habituelle" un trafic exceptionnel d'abricots est enregistré durant les mois d'été. Le beau temps de cette année permet une récolte abondante, principalement dans la région du Nyonsais. Plus de 1 500 Tonnes de superbes fruits de couleur orangée, apportées en gare par voie routière puis réparties en 130 wagons frigorifiques, sont parties pour la Belgique, l'Allemagne, la région parisienne, Le Nord et l'Ouest de la France. Ces importants tonnages, ajoutés à ceux habituels confiés par les expéditeur locaux, ont permis au rail de transporter, à la grande satisfaction de sa clientèle, près de 3 000 T au départ de la seule gare Orangeoise...
Le déclin...
Pourtant, le chemin de fer ne semble pas avoir pu ou su conserver les atouts qui étaient les siens et le trafic s'est lentement érodé. Peu à peu la route s'est octroyé le monopole du transport des primeurs. Plus de souplesse? Meilleure compétitivité? Augmentation de la puissance des véhicules routiers? Certainement un peu de tout cela à la fois. Dés le début des années 70, le centre de glaçage d'Avignon voit chuter son activité ferroviaire et commence à se tourner vers le transport routier. Afin de trouver de nouveaux débouchés, le site est reconverti en centre de stockage et de congélation de légumes et fruits.
Peu à peu les lignes secondaires Vauclusiennes sont neutralisées. Velleron, Pernes, Carpentras, Sarrians-Montmirail, Jonquières ferment leurs portes. Les derniers wagons à toiture blanche ou les frigorifiques quittent la région. En 1987, le centre S.T.E.F. d'Avignon est équipé d'un surgélateur. L'essentiel de son activité se tourne vers la préparation, surgélation, stockage de fruits et légumes pour les besoins de l'industrie agro-alimentaire. C'est à partir de 1995 que la fabrication de glace à destination ferroviaire est complètement arrêtée. La maintenance des installations étant devenue trop onéreuse eu égard aux faibles volumes produits. La S.T.E.F. ayant finalement perdu ses liens avec sa maison mère ferroviaire, ses activités sont tournées vers le transport routier...
1969 | 1970 | 1971 | 1972 | 1973 | |
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Tonnes | 15082 | 21812 | 25869 | 26042 | 29353 |
Wagons | 1727 | 2306 | 2769 | 2630 | 2803 |
EXPEDITIONS PAR FER AU DEPART DU M.I.N. DE CAVAILLON |
1963 | Nbr Wagons | Tonnes |
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Aubignan Loriol | 216 | 1944 |
Avignon | 2546 | 22914 |
Cadenet | 131 | 1179 |
Carpentras | 4365 | 40000 |
Cavaillon | 8604 | 72000 |
Gadagne | 152 | 1368 |
L'Isle/s | 263 | 2367 |
Lauris | 235 | 2115 |
Le Thor | 1700 | 15300 |
Mérindol | 71 | 639 |
Monteux | 455 | 4095 |
Orange | 822 | 7398 |
Pernes | 1119 | 10071 |
Pertuis | 130 | 1170 |
Sarrians Mont. | 1683 | 15147 |
Villelaure | 67 | 603 |
Les poids lourds forment parallèlement de longs convois sur l'autoroute A7, partant livrer dans la nuit le marché de Rungis ou les pays du Nord de l'Europe. Si le transport routier est à ce point efficace, pourquoi ne pas s'en faire un allié? Les "petites" gares ont disparu. Le camionnage est plus souple. Qu'à cela ne tienne. La S.N.C.F lance, courant 1988, un concept nouveau pour les expéditions de denrées sous température dirigée. Il est baptisé "CHRONOFROID". Le procédé en est simple. Des "caisses mobiles" réfrigérées, sont proposées aux clients qui assurent directement le chargement des produits sur les lieux de cueillette ou dans des centres de regroupement (non embranchés au réseau S.N.C.F.). Ces semi-remorques sont tractées par des poids lourds. Les éléments routiers, commandés spécialement par la S.N.C.F. (50 unités dans un premier temps), peuvent recevoir jusqu'à 26 palettes (100x120cm).
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Une fois le chargement effectué, la remorque est conduite sur le site multimodal d'Avignon-Champfleury. La caisse y est désolidarisée du châssis routier et chargée, grâce à de puissants portiques, sur un wagon "MULTI FRET S70" spécialement étudié à cet usage. Une fois le train complet, il est acheminé en régime spécial (140 Km/h) jusqu'à son point de destination où la manoeuvre inverse est effectuée pour livraison au client final. Les qualités intrinsèques des transports routiers et ferroviaires sont ainsi réunies et complémentaires. Souplesse, rapidité, sécurité, efficacité.
Chantier multimodal d'Avignon Champfleury.
La première liaison "CHRONOFROID" Avignon-Valenton (Rungis) est lancée en mai 1988. Les hommes de la petite équipe très motivée d'Avignonnais et de Valentonnais, se doivent aussi de trouver du fret pour remplir les caisses durant leur voyage de retour. La S.N.C.F, souhaite "récupérer" ainsi près de 200 000T de trafic annuel. Au fil du temps, plusieurs centres "CHRONOFROID" sont ouverts (Lyon, Toulouse, Perpignan, Lille, Nancy), alors que de nouveaux matériels sont acquis par la S.N.C.F.. Les courants de transport sont étendus aux produits laitiers, viandes ainsi que produits surgelés... La vitesse limite de certaines circulations est portée à 160 Km/h. Le tronc commun Avignon-Valenton est desservi, à l'origine, comme suit:
Train 50054 | Lundi au jeudi | AVIGNON 20H30 | VALENTON 3H10 |
Train 50946 | Dimanche | AVIGNON 19H53 | VALENTON 3H30 |
Train 50536 | Lundi au vendredi | VALENTON 3H52 | AVIGNON 21H02 |
AVIGNON | => | LILLE | - | 20 H 00 | => | 5 H 00 | - | 160 km/h |
LILLE | AVIGNON | - | 18 H 55 | 4 H 50 | - | 160 km/h | ||
. | ||||||||
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AVIGNON | VALENTON | - | 20 H 15 | 5 H 00 | - | 140 km/h | ||
VALENTON | => | AVIGNON | - | 14 H 30 | => | 22 H 30 | - | 140 km/h |
VALENTON | AVIGNON | - | 20 H 30 | 4 H 00 | - | 140 km/h | ||
. | ||||||||
AVIGNON | => | NANCY | - | 20 H 20 | => | 5 H 00 | - | 140 km/h |
NANCY | AVIGNON | - | 19 H 30 | 5 H 00 | - | 140 km/h | ||
Dessertes 1997 |
A partir de 1997, CHRONFROID devient FROIDCOMBI. Le début de l'année 2000 voit la simplification des installations de la S.T.E.F. de Fontcouverte. Une partie des voies de remisage sont déposées, alors que les tours de glaçage devenue inutiles sont démolies. C'est le 2 juin que les crocs de la pelle mécanique commencent à mordre la structure de la plus ancienne des 4 tours.
Démolition des tours de glaçage en 2000
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Autres Sites et documents.
- Bulletin P.L.M. n°37 (janvier 1935)
- Le bulletin P.L.M. n°51 (mai 1937)
- La Vie du Rail n°....
- Production des fruits et légumes en Vaucluse.
- Raisins de table et station uvale d'Avignon.
- La ligne Paris-Marseille.
- Vidéo INA les stations uvales.
- Le raisin de table élément de l'économie vauclusienne.
- Revue Connaissance du rail 232
- Revue Ferrovissime n°52 (2012) les wagons de la STEF.
- Revue Historail n°22 (2012) Témoignage de M L Armand.
- Revue Histoire des CdF n°41 (2009)
- Correspondances ferroviaires n°10 (2004)
- Les glacières du Ventoux.
- Revue Rail Passion n°5
- Charles Tellier
- S.T.E.F.
- Revue Voies ferrées 63 (Chronofroid)
- Revue Bulletin PLM n°1 (le service agricole du PLM)
- Revue Bulletin PLM n°5 (Lutte contre les ennemis des cultures)
- Revue Bulletin PLM n°6 (La production de fruits sur le réseau PLM)
- Revue Bulletin PLM n°15 (La campagne des primeurs en 1931)
- Cadres primeurs PLM
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