LA LIGNE D'ORANGE A L'ISLE/SORGUE (LA GENESE)..
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Les rêves Comtadins...
Les rêves industriels des Comtadins avaient, en grande partie, expliqué leur acharnement à obtenir une ligne de chemin de fer reliant Carpentras et la ligne Paris-Marseille. Mais ces espoirs ont fait "long feu" et les industries traditionnelles ont peu à peu disparu.
Vers 1881, la teinture rouge extraite de la garance, l'Alizarine, est remplacée par un colorant de synthèse, et les filatures de soies périclitent (le besoin de feuilles de mûrier, pour la nourriture des vers à soie, s'en trouve fortement réduit). En l'espace de quelques années, les producteurs vauclusiens doivent donc se reconvertir. Arrivé depuis quelques dizaines d'années en Vaucluse, le chemin de fer, combiné à l'installation du canal de Carpentras, leur offre alors un atout considérable en permettant aux productions agricoles locales de bénéficier de débouchés rapides et lointains. Ainsi, sur les anciennes "terres à garance", les producteurs vont-ils pouvoir développer la culture maraîchère et fruitière.
C'est ainsi que l'on songe, du côté de Carpentras, à réclamer à la Cie du P.L.M. d'élargir l'offre ferroviaire en installant un réseau de lignes complémentaires régionales, embranchées sur la ligne Impériale. On le souhaite bâti en "étoile" autour de la sous-préfecture. La loi de 1865 offre désormais un cadre légal à l'extension du réseau des ligne d'intérêt local. Les élus Carpentrassiens émettent donc (mai 1868) le voeu d'une ligne reliant Orange à L'isle/Sorgue passant par leur ville. Voeu repris par le Conseil Général et la chambre de commerce d'Avignon.
Quel plaisir de travailler sous ces immenses platanes... Le travail est dur, mais l'ambiance chaleureuse. Pour étayer le dossier on insiste sur le coté stratégique présenté par cette éventuelle installation. La nouvelle ligne permettrait de détourner ou de délester le trafic de la ligne impériale, en cas de perturbations vers Cavaillon et Miramas. Mais ce que n'avouent pas directement les élus carpentrassiens, c'est le désir de voir leur commune reprendre le lustre passé que lui avait ôté le développement de la préfecture et que la position stratégique de noeud ferroviaire lui rendrait en partie. Cette proposition est donc intégrée dans un faisceau de projets d'origine privée visant à établir un réseau de chemin de fer cohérent dans le nord du Comtat venaissin (Projets Oppermann, Prunier, Morette & Javal) pour l'instant délaissé par le rail. La gare de Sarrians-Montmirail. Remarquer le wagon à toit blanc pour le transport des primeurs. A gauche de la photo on aperçoit le hangar à primeurs. Nous sommes en 1984, la fermeture en proche... Le temps des discussions... Mais de cette abondance de projets, rien de définitif ne sort et, en 1876, la municipalité Carpentrassienne doit renouveler son voeu originel. Un voeu désormais inclus dans le cadre plus ambitieux de la création d'une seconde ligne Lyon-Marseille, prenant sa source à Orange et se dirigeant vers Carpentras, Cavaillon et Miramas. Le Conseil Général vote même un crédit d'étude de 1 200Fr. pour l'exercice 1878. Mais les instances gouvernementales sont partagées sur ce projet quant au point de jonction avec la ligne impériale. Si le projet initial le prévoit localisé à Orange, d'aucuns souhaiteraient le voir à Sorgues (ligne se dirigeant vers St-Saturnin. Le Conseil Général souhaite que le projet Orange-L'isle soit substitué au projet Sorgues-Carpentras en cours d'étude dans le cadre des projets de loi du réseau complémentaire des Chemins de Fer secondaires. La gare d'Aubignan-Loriol. La BB 63000 assure la desserte. Le trafic est devenu rare. Nous sommes tout près de la fermeture.
La polémique est vive et les discutions houleuses, surtout lorsque le ministre des Travaux Publics en personne propose d'adopter le second tracé. La municipalité Carpentrassienne farouchement opposée à cette proposition se voit donc obligée (janvier 1879) de déléguer 2 émissaires auprès du ministre pour y défendre son point de vue. Pourtant, alors que les politiques débattent, les études concrètes conduites par l'ingénieur civil Courtasse, continuent sur le terrain (propose Miramas, Cavaillon, l'Isle, Carpentras, Vaison, Valréas, Nyons, Dieulefit). Ces études, permettent au Conseil Général de faire inscrire le projet de ligne Orange-L'Isle, au titre du complément de construction des lignes d'intérêt général, dans le cadre de la nouvelle loi Freycinet . La ligne est enfin classée comme concession éventuelle en 1879 (n°134 loi du 17/7/1879. Définitivement concédée au P.L.M. par la convention du 26/5/1883 approuvée le 20/11/1883). Pour "emporter" la décision, le Conseil Général avait par ailleurs proposé de financer pour moitié l'acquisition des terrains nécessaires à la mise en place de la nouvelle ligne. Il est prévu, de tout acheter et tout construire dans l'optique d'une ligne à double voie. Les dépenses sont estimées à 6 950 000 Fr. dont 4 000 000 Fr. pour les seules infrastructures (1 voie). L'acquisition de matériel roulant ferait monter le total à 7 712 000 Fr.. La "grande" gare du milieu de la ligne à Carpentras. Noter la marquise PLM sur le quai central... Tout cela a disparu depuis longtemps... C'est dans cette gare que la ligne d'Orange à l'Isle rencontre celle de Sorgues à Carpentras. La déclaration d'utilité publique est prononcée en avril 1880 (confirmée le 7/1/1881), plus de 15 ans après l'émission des premiers voeux. M De Gasparin, maire d'Orange, accepte la présidence de la commission d'enquête, laquelle est composée de diverses notabilités dont MM Fourmon, maire de l'Isle/Sorgue, Leenhardt négociant à Sorgues, Fortunet, conseiller général à Carpentras, Guérin, directeur du canal de Carpentras, Gautier, adjoint au maire de Carpentras, Seynes, maire de Saint Didier, Raspail conseiller général à Gigondas et Briançon négociant à Orange. Mais les Comtadins ne sont pas pour autant "au bout de leurs peines". Les spécialistes estiment que ;2 ans seulement suffiront pour établir cette nouvelle ligne... En réalité, prés de 12 ans de lutte seront nécessaires avant de voir circuler le premier train entre Orange et L'Isle. Le nombre et l'emplacement des stations sont officiellement définis par décision ministérielle du 4 mars 1881.
La gare de Pernes les fontaines. Nous sommes presque à la fin de l'exploitation à Pernes. On aperçoit encore le locotracteur Y7000 qui manoeuvre un wagon trémie d'engrais pour déchargement sur le pont de la Nesque. (1984.)
Des difficultés administratives. Déjà, l'acquisition des terrains pour l'établissement de la voie et des gares se heurte à de très nombreuses difficultés. Un nombre impressionnant de "dossiers" est constitué sur les communes de Velleron, Le Thor, Pernes, Carpentras, Loriol, Sarrians... Si le Conseil Général tient à peu près ses promesses, il n'en est pas de même de l'administration centrale qui octroie les indemnités "au compte-gouttes". De nombreux propriétaires contestent les estimations financières et la superficie des parcelles à exproprier. L'arbitrage de la justice est nécessaire. Les expropriations sont effectuées sous le contrôle de MM Caillet et Jacquet avoués à Carpentras et Avignon. Le tracé lui-même est empreint de polémique. On discute, par exemple, à Velleron sur des tracés passant à l'Est ou l'ouest du village, ou à Pernes où l'on souhaite un déplacement de l'emplacement prévu pour la gare. La municipalité la souhaiterait implantée au quartier de Toussaint, sur le bord de la Nesque. En février 1881, la commune s'engage même à créer une rue "de la gare" pour assurer la desserte de celle-ci. Mais les années s'écoulent et rien de concret n'apparaît. La commune de Pernes qui a dépensé 15 000 Fr. pour construire la rue de la gare, réclame en 1885 la prompte exécution des travaux... Puis encore en 1886 et en 1887, 1888, 1889... Ainsi que d'autres communes, Orange, l'Isle/Sorgue etc.. Mais le P.L.M. ne dépose le projet définitif qu'en 1886, lequel est approuvé en ce qui concerne les terrassements en janvier 1887. Quant à l'arrêté de cessibilité pour cause d'utilité publique il n'est diffusé que le 25/11/1889! Les caisses de la Cie. sont fortement malmenées par les autres travaux de construction. Il faut terminer ce qui est commencé avant d'ouvrir de nouveaux chantiers.
La gare de Velleron.
On propose aussi en 1886 et 1887 des variantes passant par Camaret, Violès et Vacqueyras au lieu de Sarrians et Jonquières. Une pétition circule en 1887 sur ce sujet. On réclame l'établissement d?une halte à Sarrians quartier des Sablons. On discute, enfin, du point de raccordement de la ligne à celle d'Avignon-Miramas. A Carpentras et Cavaillon, on préférerait que la ligne soit prolongée pour que le raccordement soit effectué directement à Cavaillon, ce qui parait être l'avis du ministère, (Décision du 30 décembre 1881 fixant Cavaillon comme tête de ligne...) qui finalement se rétracte et revient sur le projet initial de raccordement à l'Isle sur Sorgue, tout en conservant une exploitation directe jusqu'à Cavaillon (mai 1893. Le coût de 91 000Fr occasionné par la modification du projet ne serait pas justifié). Diverses évolutions sont finalement avalisées, comme cette demande de halte entre Orange et Jonquiéres. Un décision ministérielle de 1893, confirme l'acquisition d'un simple quai pour les voyageurs (sans abri, ni bagages) au P.N. de Pied-Card. Il en coûte toutefois 4 000Fr.. La commune de Sarrians en finance une partie, le reste est fourni via une souscription. Une autre (2 décembre 1894) donne accord pour le projet d'agrandissement de la gare d'Orange. Satisfaction est aussi donnée à M. Desplan, propriétaire de l'établissement thermal de Montmirail. Le 13/07/1893, le P.L.M. accepte de nommer la future gare de Sarrians, SARRIANS-MONTMIRAIL.
La gare terminus de l'Isle/Sorgue. La ligne rejoint ici la grande ligne Avignon Marseille par Miramas. Noter là aussi la marquise PLM sur le quai central. La prise de vue est effectuée côté Marseille, la voie d'Orange arrive de l'autre côté de la gare.
Les chantiers sont enfin ouverts.
L es travaux sont pourtant commencés "dés" 1891, car dans tous les cas ils seront particulièrement importants. Notamment dans les gares de jonction d'Orange, Carpentras et L'Isle/Sorgue qui, déjà en exploitation, doivent être entièrement réorganisées. La gare de Carpentras perdant, de fait, son statut de gare terminus, pour devenir gare de bifurcation. Mais les travaux ne sont pas seulement ferroviaires. La mise en place de la nouvelle voie scinde la ville en deux! De nombreuses rues et ruelles doivent être réaménagées, notamment la route d'Avignon (dont le niveau est abaissé de plus d'un mètre au P.N. de la gare!). Ces importants travaux se déroulent sur fond de désaccord financier entre la commune, l'Etat et le P.L.M.. Ils posent aussi des problèmes de sécurité. De nombreux "curieux" semblent se presser sur les zones de travaux, au point qu'un arrêté interdisant la circulation du public doit être pris! Puis, les premiers trains circulent enfin. Mais les installations de sécurité aux passages à niveau ne sont pas encore en place et ces circulations présentent des risque d'accidents graves. La mairie de Velleron réclame des mesures visant à réduire ces risques (suite à un accident évité de justesse sur la commune). Le chantier requiert une importante main d'oeuvre... Souvent étrangère. Le maire de Jonquières s'en émeut et demande que seulement 10% d'ouvriers étrangers ne soient admis sur les chantiers. Mais aucune loi ne peut imposer ce quota! L'extraction de graviers dans le lit de l'Ouvèze, soulève aussi des protestations de riverains car nuisant à l'irrigation.
Les travaux se poursuivent et... Le train roule enfin... Q uelques jours après la marche d'un train d'essai et épreuve des 45 ouvrages d'art le 8 octobre, la ligne est enfin livrée à l'exploitation (3 novembre1894, bien que tous les aménagements des gares ne soient pas encore totalement terminés). 30 ans se sont écoulés entre le lancement des projets et la mise en exploitation effective de la ligne! A partir de 1898, les délaissés sont reversés à l'administration des domaines et remis en vente aux enchères publiques.
L a ligne est construite à voie unique. Elle prend sa source en gare d'Orange au PK 713,253 de la ligne impériale (Dans l'axe du B.V.). Elle lui est parallèle sur plusieurs kilomètres. Puis, son tracé s'infléchit pour atteindre la gare de JONQUIERES (P.K. 6,746). L'Ouvèze est franchie sur un viaduc de 48 mètres et un pont métallique de 82 mètres. La ligne descend ensuite vers la vallée de la Salette et la gare de SARRIANS-MONTMIRAIL (Au P.K. 13,336) , traversant au passage l'ancienne halte de PIED CARD (P.K. 11,159) . Au-delà de cet établissement et après franchissement du Brégoux, la ligne s'infléchit légèrement vers le sud et entame une longue montée vers Carpentras. La gare d'Aubignan-Loriol est atteinte après la traversée d'un pont métallique sur le Méde (30 mètres) (P.K. 17,345). Elle est située à mi-chemin entre les deux villages dont elle porte le nom (ce qui ne manque pas de poser problèmes aux agents en prêt sur l'établissement, en terme de logement...). Le rail pénètre dans Carpentras après franchissement d'un superbe viaduc de 150 mètres en quinze arches et traversée de la ville en grande partie en tranchée (P.K. 21,926).
C'est là que s'opère la rencontre avec la ligne de SORGUES. Celle-ci est laissée sur la droite dés la sortie de la gare et la voie, par un tracé presque rectiligne et en pente douce, se dirige vers Pernes les Fontaines (P.K. 27,685) . C'est après le franchissement d'un pont métallique de 25 mètres sur la Nesque que la ligne se dirige, toujours presque rectiligne, jusqu'à Velleron (P.K. 33,005) et pénètre dans le pays des Sorgues dont elle franchit de nombreux bras. L'arrivée en gare de L?Isle fontaine de Vaucluse est effectué en courbe par le Nord-est, de concert avec la ligne d'Avignon (P.K. 37,976).
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6.06 - 2 ORANGE A L'ISLE-FONTAINE-DE-VAUCLUSE _ Voie unique. - Signalisation simplifiée. - Cloches électriques.
CARACTERISTIQUES GENERALES D'EXPLOITATION
_ Gare de commande : ORANGE.
_ Section de ligne à périodes de fermeture à la circulation et à signal de clôture : Orange à Carpentras.
_ Section de ligne à périodes de fermeture à la circulation : Carpentras à Pernes.
_ Ligne sans répétition des signaux.
_ Ligne où les dispositions de l'avis général de sécurité n°2 sont susceptibles d'être appliquées.
_ Ligne non équipée pour le chauffage électrique des trains remorqués par des locomotives diesel.
_ Distance particulière de couverture des obstacles : 800 mètres.
_ Ligne à signalisation d'arrière allégée.
BAREMES D'EQUIVALENCE | |||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
6.06 2 | ORANGE à L'ISLE Fne DE VAUCLUSE | ||||||
TRAINS DE MESSAGERIES ET DE MARCHANDISES | |||||||
CHARGES ADMISES | |||||||
MESSAGERIES | MARCHANDISES | ||||||
Séries de ref. | Orange à Carpentras | Carpentras à Orange | Orange à l'Isle | Orange à Carpentras | L'Isle à Carpentras | ||
63500 | 450T | 500T | 600T | 800T | 550T | ||
63000 | 390T | 430T | 520T | 600T | 450T | ||
63109 | 420 | 470T | 570T | 680T | 500T | ||
66000 | 500 | 550T | 700T | 750T | 650T | ||
Limite de résistance | 1965T | 1965T | 1965T | 1965T | |||
Des attelages | 2360T | 2360T |
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