LES CHEMINS DE FER ET LES "INTEMPERIES"..
De très nombreuses activités humaines sont très "sensibles" à l'environnement... Pensons ici notamment aux activités liées aux transports. Inutile de préciser que la navigation maritime et aérienne sont, par exemple, fortement tributaires des conditions météorologiques. Les chemins de fer sont, eux aussi, de par leur caractère particulier et leur développement sur tout le territoire particulièrement sensibles au caprices du temps... Et pour peu que les éléments se déchaînent les difficultés surgissent rapidement.
Rappelons nous que les trains doivent rouler (et arriver à l'heure!) 24 heures sur 24, 365 jours par an, quelles que puissent être les conditions rencontrées tout au long du chemin. Pour que cela soit possible il y a des Hommes, du matériel roulant, une organisation, une signalisation... Mais il y a aussi des impondérables: De la pluie, du brouillard, du froid, du vent, des inondations, de la neige, du givre mais aussi du soleil ardent et, dans notre belle Provence, les uns comme les autres peuvent être violents et changeants.
Avant d'entrer dans le détail et de présenter quelques anecdotes spécifiquement Vauclusiennes, voyons ensemble toutes les interractions possibles entre les éléments et les chemins de fer.
Absolument aucune "protection" pour le personnel de conduite sur cette antique machine.
Et pas grand chose de mieux quelques décennies plus tard...
Commençons par ceux qui représentent le mieux aux yeux du grand public le métier de cheminot, les agents roulants. Revenons aux premiers temps des chemins de fer et imaginons le mécanicien et le chauffeur de la locomotive debouts sur la plate-forme ouverte de leur engin. Qu'il fasse beau par une superbe journée de printemps ou de début d'été et le travail en est facilité. Mais que la pluie survienne, ou pire encore l'orage (comme nous en connaissons en Provence!), que le MISTRAL se mette à souffler, que la neige tombe ou qu'il gèle à pierres fendre au plus profond d'une nuit de décembre et le travail devient inhumain. Il faudra attendre près d'un demi siècle pour voir le personnel des locomotives plus ou moins sommairement abrité. Mais jusqu'à la fin de la traction vapeur, c'est avec la tête et le buste dehors que se conduiront les machines, fussent elles les plus modernes. Si maintenant nous nous imaginons au plein coeur d'un été torride, ils semble bien difficile de se mettre à la place des ces 2 hommes, devant accomplir une tâche particulièrement physique en pleine chaleur, le ventre "rôti" par le foyer. N'oublions pas le fameux Mistral de la vallée du Rhône... Lorsqu'il souffle violemment la température chute et de plus il ralentit fortement les trains "montants". Il alourdit alors le travail du chauffeur qui doit enfourner plusieurs centaines de kilos de charbon en complément à la charge habituelle pour faire face à la demande de puissance supplémentaire. C'est pour cela que les ingénieurs du P.L.M. développeront des machines aérodynamiques ou équipées de cabines profilées offrant une moindre prise au vent... Un style particulier que le connaisseur saura retrouver sur toutes les machines de la Compagnie. Bien sûr toute cela s'est grandement amélioré avec l'apparition des motrices électriques, mais de nos jours encore le T.G.V., aussi moderne soit-il, doit se soumettre aux caprices du Mistral et réduire sa vitesse à la traversée du viaduc d'Avignon!
Une des fameuses "coupe vent" du P.L.M. de la série des 220 C et une ATLANTIC d'origine américaine... Un abri pour le personnel un peu plus "efficace" mais encore relatif... Brûlé devant par la chaleur du foyer et gelé par derrière par le vent de la course.
Mais sur chaque train il n'y a pas que le personnel de conduite. Des hommes sont placés sur quelques wagons pour y manoeuvrer le frein à vis. Si la tâche est moins pénible à priori pour eux, elle n'en est pas moins inconfortable. Ils doivent rester des heures debouts ou assis en plein vent, à peine abrités par une guérite sommaire, en attendant les ordres du mécanicien. Les contrôleurs ne sont pas mieux lotis, qui doivent cheminer tout au long du train sur le marchepied extérieur des voitures pour contrôler les billets... Et tant pis si le vent souffle, la pluie tombe ou le marchepied est verglacé!
Le "serre freins" dans une situation pas vraiment confortable... Et le marchepied latéral d'une voiture P.L.M. sur lequel le contrôleur doit jouer les équilibristes.
Quant aux voyageurs... C'est à peine mieux! Les tout premiers voyagent dans des tombereaux à charbon... Ouverts! Après cela s'améliore mais lentement. Il faut dizaines d'années pour des voitures fermées. Il faudra plus d'un siècle pour voir apparaître la climatisation! Quant au chauffage pour l'hiver, il se résume souvent à quelques bouillottes sous les pieds en 1ère classe et rien pour les autres. Au fur et à mesure de l'évolution, des poëles à charbon seront installés dans les voitures puis le chauffage par la vapeur et enfin le chauffage éléctrique sur les matériels les plus récents.
Pour que tous ces trains circulent il faut bien sûr des voies et des infrastructures et, pour elles aussi, la lutte contre les éléments est un travail au quotidien. Il faut tout d'abord définir des tracés de voies mettant le chemin de fer à l'abri des principales inondations, tout en laissant librement circuler les eaux. Ce sont donc des centaines d'ouvrages (viaducs, aqueducs, etc) qu'il faut mettre en place tout au long des voies ferrées. Quand tout circule enfin, les hommes de la voie doivent lutter jour après jour contre les éléments... La chaleur qui dilate les rails au risque des les déformer, ou le gel qui les rends cassants comme du verre... La pluie qui ravine les plate-formes. Les inondations qui dégarnissent les voies, la neige qui les obstrue. Les crues qui affouillent les fondations des ouvrages. L'humidité qui pourrit les traverses, le vent qui déracine les arbres et les couche sur les voies... Alors les brigadiers de la voie doivent changer les traverses, bourrer les voies, nettoyer, curer les drains, déblayer les appareils de voie de la neige et leurs systèmes de commande... Sans que jamais la lutte ne prenne fin. Dans certaines gares ou dépôts on conserve un wagon soc chasse-neige. Dans les zones montagneuses ce sont des engins spécifiques qui sont requis (le dépôt de Pertuis est pourvu d'un wagon étrave chasse-neige). Les gardes-barrièrene sont pas à la noce non plus... Car c'est à elles qu'échoit la tâche de déneiger leur P.N..
Wagon étrave chasse-neige moderne. (Dépôt SNCF de Vénissieux)
En complément de tout cela il ne faut pas oublier la signalisation... Depuis les tout premiers postes à pied d'oeuvre, jusqu'aux postes d'aiguillages et la signalisation électrique moderne, jamais la signalisation n'a pu souffrir la moindre anomalie... Que le soleil d'août dilate les commandes funiculaires ou que le givre grippe poulies et commandes, que le vent vienne moucher les lampes à pétrole placées sur les mâts de siganlisation... Et tous les trains cessent immédiatement de circuler. Là encore pas de répit pour les agents, par tous les temps, à toutes les heures ils doivent veiller à ce que tout cela fonctionne.
Et puis il reste tous les autres... Les hommes des gares, des triages, des ateliers... Qui affrontent eux aussi les éléments. A tout moment il faut atteler ou dételer des wagons, former des trains dans les triages. Combien de saboteurs ont du perdre la vie pour avoir glissé sur des rails verglacés ou ne pas avoir aperçu le wagon déboulant tout à coup de l'épais brouillard? Il faut remplir les tenders de charbon et d'eau, maintenir les machines au repos dans les dépôts hors gel (des braséros sont placés près des grues à eau et dans certains lieux des dépôts). Il faut transporter, manutentionner, stocker et protéger les marchandises... On installe des quais couverts pour les marchandises fragiles, des abris spécifiques pour les primeurs qui n'apprécient pas les ardeurs du soleil, on installe des bâches sur les wagons plats pour sauvegarder les marchandises craignant "la mouille"... Il faut aussi assurer le départ des trains, les opérations de sécurité, débloquer les freins des wagons pris par la glace, remplir les lampes à huile des voitures en montant sur les toitures, veiller sur les signaux, laver les wagons et les voitures, sans se soucier du temps qu'il fait, du jour ou de la nuit... C'est tout cela et plus encore les métiers des chemins de fer.
jour de neige...
Le lampiste sur le toit d'une voiture en train d'allumer les lampes en fin de journée...
ANECDOTES VAUCLUSIENNES.
Napoléon III en visite en Vaucluse suite aux terribles inodations de 1856.
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MINISTERE DES TRAVAUX PUBLICS Monsieur le préfet, vous m'avez fait l'honneur de me transmettre le 4 juin dernier, le dossier de l'instruction à laquelle a été soumise une demande du conseil municipal de SORGUES ayant pour objet d'obtenir la construction d'un abri pour les voyageurs à la gare de cette ville. La compagnie des chemins de fer de PARIS à LYON et à la MEDITERRANEE, consultée allègue que le trottoir qui sépare la voie descendante de la voie de CARPENTRAS, dont la longueur n'est que de 4 mètres, est trop étroit pour recevoir une construction présentant quelque utilité, que la pluie est d'ailleurs très rare dans la localité, et qu'un abri ouvert, le seul qui pourrait être construit ne préserverait en aucune manière le public. MM les ingénieurs du service du contrôle , après avoir fait observer que la pluie n'est pas plus rare à SORGUES que dans tout le département , ne voient pas comment la faible largeur du quai pourrait être un obstacle à l'établissement d'un auvent de la forme dite à parapluie, supporté par un ou deux rangées de colonnes et s'étendant même au dessus des voies de la voie de CARPENTRAS pour abriter les trains venant de cette direction et qui sont obligés de stationner dans la gare de SORGUES pendant un temps plus ou moins long. D'accord avec M L'inspecteur général chargé du contrôle, vous pensez , Monsieur le Préfet, que la demande du Conseil Municipal de SORGUES est justifiée par l'importance de la gare. J'ai l'honneur de vous informer, Monsieur le Préfet, après examen de l'affaire en conseil des ponts et chaussées et conformément à l'avis de ce conseil, j'ai décidé qu'il y avait lieu d'inviter la compagnie à soumettre à l'administration des propositions pour l'établissement à la la gare de SORGUES d'un abri sur le trottoir de la voie de CARPENTRAS. Je vous prie de donner sans retard connaissance de cette décision à M l'inspecteur général chargé du contrôle, à M le Maire de SORGUES, ainsi qu'à la compagnie et d'en assurer l'exécution en ce qui vous concerne. Recevez, Monsieur le Préfet, l'assurance de ma considération la plus distinguée. Le ministre des travaux publics . Document incomplet A.D. VAUCLUSE | - |
Nous pouvons commencer par une anecdote quelque peu savoureuse concernant la gare de Sorgues... Presque aux débuts des chemins de fer. Cette gare de passage comprenanit à l'origine, comme ses soeur, un abri de quai pour les voyageurs. Mais quelques années à peine après sa contruction cet abri a été démoli, pour faire place à la nouvelle ligne de Carpentras... Laissant les voyageurs à destination d'Avignon ou de Carpentras bien désemparés lorsqu'ils devaient attendre sous la pluie. La municipalité s'est alors empressé de réclamer à la Cie, la mise en place d'un nouvel abri que ladite Compagnie s'est empressée de refuser... Au prétexte qu'à Sorgues il ne pleut pas souvent! Et voilà comment faire des économies... Une marquise sera finalement arrachée de haute lutte... Mais si les voyageurs ont été alors abrités de l'eau ils ne l'étaient pas du Mistral... Mais c'est là un moindre mal.
Dès l'ouverture de la ligne de Cavaillon à Apt vers 1877, le transport des ocres commence... C'est l'un des trafics les plus importants de la ligne... Mais... La compagnie du P.L.M. utilise ses wagons "classiques" (tombereaux et plats essentiellement) sans autre précaution. C'est oublier que dans la vallée du Rhône le vent peut être violent... Par une journée de Mistral cette fine poussière jaune partit en jolis tourbillons... Tout le quartier de la gare de Cavaillon fut coloré en jaune! Après cette histoire épique et le procès qui s'en suivit, l'ocre ne fut plus chargée dans des wagons découverts et conditionnée en tonneaux.
Durant les dernières années du XIX eme siècle de nouvelles lignes de chemin de fer se construisent en Vaucluse, notamment celle reliant Apt et Vols. Les travaux en sont particulièrement pénibles et longs. Si la réception définitive des terrassements est effectuée le 15/05/1884. Celle, provisoire, des ouvrages d'art n'est prononcée que le 10/08/1886!!! Des conditions météorologiques très difficiles ont imposé de profondes modifications au projet initial. Un orage d'une violence extrême, le 4/09/1885, cause des dégâts considérables aux propriétés et chemins traversés par le rail, dont la plate forme empêche la libre circulation des eaux. Ces hautes eaux qui vont aussi noyer l'usine à gaz d'Apt et provoquer de graves avaries aux terrassements du chemin de fer. De toute évidence il faut prévoir, pour se sauvegarder des crues violentes à venir, de renforcer les talus, empierrer les berges, augmenter la profondeur des fouilles, rehausser deux ponts placés sur des ravins pour augmenter le débit... Bref, renforcer considérablement le dispositif ce qui alourdit sérieusement le devis et rallonge le temps de construction. Les travaux sont malgré tout terminés pour fin 1890.
En 1894, on expédie et reçoit 2 500 wagons à Lauris. Ils sont chargés principalement de primeurs et de fruits, mais les installations ne croissent pas au même rythme que les trafics. Les expéditeurs se plaignent du manque chronique de matériel de personnel et de place pour le stockage. L'état de la gare est connu du P.L.M., mais cet établissement n'est pas prioritaire... Pendant ce temps les marchandises sont stockées à l'extérieur. La situation empire au point qu'un soir, prés de 80 tonnes de raisin sont détruites sur les quais de la gare par un violent orage!..
La très belle marquise de Sorgues... Sur le quai central.
Voyons maintenant d'autres événements toujours liés aux intempéries, mais parfois nettement moins sympathiques... Le 19 janvier 1901, M Mateline, chauffeur/mécanicien, conduit une quarantaine de wagons sur le triage Petite Vitesse en gare d'Avignon. La manoeuvre consiste à placer son train sur une voie déjà partiellement occupée. Mais en cette nuit de janvier (il est 2 heures du matin) il fait très froid et les rails sont recouverts de verglas... Malgré sa vigilance le mécanicien ne parvient pas à freiner son train en temps voulu et vient heurter les wagons arrêtés. Sous la violence du choc, un wagon se soulève et "monte" littéralement sur la machine. Il se couche ensuite sur l'abri de la locomotive qu'il broie sous son poids. Le malheureux conducteur de se retrouver ainsi prisonnier d'un amas de tôles. Pas moins d'une heure d'efforts est nécessaire pour tirer l'infortuné homme de sa fâcheuse posture. C'est grièvement brûlé et dans un état critique qu'il est enfin retiré de sa prison métallique...
Entre les 12 et 19 novembre 1935, de fortes précipitations occasionnent de graves inodations à Avignon. La montée des eaux est tellement rapide que les agents sont "bloqués" chez eux et qu'ils ne peuvent remplacer leurs collègues eux mêmes prisonniers des eaux à leurs postes de travail. Spontanément les cheminots se dévouent pour que le service soit assuré du mieux que possible, malgré les conditions extrêmes. Ce dévouement est tel que les cheminots Avignonnais sont collectivement cités à l'ordre su réseau (Sont collectivement cités à l'ordre du réseau les agents des divers services, qui se sont signalés par leur dévouement et leur zèle lors des importantes interceptions de lignes et à l'occasion des importants inondations survenues en novembre dans la région d'Avignon...).
Bédarrides... 1907... Avignon 1910...
Cheval Blanc... Plusieurs anecdotes sont relatées dans un quotidien, mais sans indication précise de date. Nous les situerons dans l'entre deux guerres. Elles ont pour cadre la gare d'Avignon... L'une d'entre elle se trouve liée à notre bon vieux Mistral...
Par un après midi de fort Mistral une dame élégante d'une quarantaine d'années court après un superbe chapeau qu'EOLE a ôté de sa tête. Le chapeau roule sur le quai alors que la dame tente, en vain, de le rattraper. Mais sous la verrière le courant d'air est violent... Tout à l'extrémité du quai, plusieurs "commissionnaires" (nous dirions aujourd'hui porteurs) attendent la clientèle. L'un d'eux, ayant aperçu le "manège", se précipite au secours de la dame. Mais, manquant probablement un peu de discernement, ne trouve rien de plus astucieux pour arrêter le couvre chef que de... Sauter à pieds joints sur celui-ci. On imagine facilement le résultat d'une telle initiative qui, si elle était parvenue à arrêter le chapeau dans sa course folle, ne l'avait pas moins définitivement détruit... Fier d'avoir pu rendre service, le brave homme ramasse les restes de la coiffure et les présente, souriant, à la passagère qui parvient à sa hauteur. Mais au lieu de le remercier pour son intervention, la voila qui l'invective sous les rires et quolibets de ses camarades. " Je savais que le Mistral était le fléau de Provence, mais j'ignorais que les commissionnaires y fussent aussi lourds". Dépité, notre commissionnaire s'en fut rejoindre ses camarades, n'ayant pas très bien compris si cette blessante remarque s'adressait à sa corpulence ou à son esprit d'initiative.
Avignon. La gare des marchandises sous les eaux.
L'année 1951 est marquée par d'importantes inondations. Les mois de mars et novembre sont particulièrement pluvieux et les précipitations font sortir les cours d'eau de leurs lits. Cela se produit dans tout le Vaucluse. Les populations sont durement éprouvées. Les dégâts sont particulièrement importants. Le réseau ferré est également touché. Les dégâts sont estimés 10 millions 300 000 Fr. pour la ligne de Villeneuve à Miramas via Cavaillon, victime du Coulon (entre les P.K. 29.600 et 30.200) et 5 millions Fr. pour la ligne Impériale aux abords de Bolléne (Crues du Lez). Plus de 500 000 Fr. sont à rajouter pour la reconstruction des bâtiments.
En 1955 un accident de travail affreux se déroule en gare de Pertuis. Le cantonnier Cassini occupé au nettoyage de scories sur une voie de garage est tué par une rame d'une vingtaine de wagons manoeuvrée par une 030 TA. Vraisemblablement victime d'un malaise du au froid il n'avait pas entendu arriver le train.
En janvier et février 1956 une vague de froid sans précédent s'abat sur le Vaucluse. Bien sûr ce n'est pas la première fois mais celle-ci va rester dans les annales. Le froid paralyse tout le pays et même une partie de l'Europe. Routes verglacées, canaux et rivières pris par les glaces, abondantes chutes de neige... Seul le chemin de fer continue, malgré les éléments déchaînés, à assurer peu ou prou son service. Le fort Mistral impose seulement une diminution des charges des trains de marchandises. Le nombre des trains de voyageurs desheurés reste très limité. Le ravitaillement des industries et des grandes villes en matières premières et denrées alimentaires est assuré de manière quasi ininterrompue. Tout ceci n'est possible que grâce à l'opiniâtreté de tous les cheminots, qu'ils appartiennent au service de l'exploitation, du transport ou de l'équipement. Mécaniciens et chauffeurs doivent affronter des conditions de conduite inhumaines. Les ouvriers de dépôts doivent surveiller en permanence les machines garées (pour les préserver du gel) et débarrasser celles rentrantes des accumulations de neige et de glace qui se sont formées durant le parcours. Les cantonniers doivent, à tout instant, dégager aiguilles et signaux dont les mécanismes sont bloqués par le froid (le système de réchauffage des aiguilles au gaz n'existe pas encore, ce sont des chaufferettes à charbon qui sont utilisées)... Quant aux employés de la gare d'Avignon, ils doivent s"empaqueter" les pieds dans des chiffons fournis par la lampisterie, pour ne pas glisser sur les quais transformés en patinoires. L'eau des tenders, qui est soulevée par le vent d'une violence extrême, se répand en fines gouttelettes qui forment de grandes plaques de verglas sur les quais. Mais les cheminots sont habitués à cette conscience professionnelle.
En janvier 1960, une vague de froid s'abat à nouveau sur le Vaucluse. Le mistral est chronométré à 220 kilomètres à l'heure au sommet du Ventoux! Des chutes de neige importantes perturbent la vie et la circulation. L'Ouvéze est partiellement prise par les glaces à Bédarrides! Si nous avons recensé dans la presse une multitude d'accidents de la route, souvent tragiques ou pour le moins spectaculaires, nous avons aussi constaté que le chemin de fer n'a pas été trop gêné par les conditions météorologiques. Grâce encore une fois au travail acharné des cheminots de la voie s'employant à déneiger et à dégager les aiguillages pris par la glace, les circulations sont un peu retardées, mais pour la plupart assurées. Le rail aura fait preuve, s'il en était besoin, à cette occasion de sa puissance et de sa fiabilité par opposition à la route. On note toutefois un accident en gare d'Avignon P.V., le 15 janvier. Le mauvais temps fait dérailler un train, dont le tender de la locomotive et un wagon citerne se couchent.
L'année 1970 se termine dans des conditions météorologiques exceptionnellement mauvaises. Dans la nuit du 27 décembre, de fortes chutes de neige paralysent la vallée du Rhône. Le 28 au matin, prés de 70 centimètres de neige immaculée recouvrent le sol à Valence. Plus bas dans le Vaucluse et la Drôme provençale, le mistral provoque la formation de congères. Les routes sont impraticables, l'électricité est coupée en de nombreux points. La neige refait son apparition le 29, portant la couche à 90 centimètres! De telles conditions n'ont pas été enregistrées depuis 1917! L'autoroute A7 est bloquée par la neige. Tombée en telle quantité et avec une telle rapidité que les moyens classique de déblaiement n'ont pu faire face. Le plan O.R.S.E.C. est déclenché dans la nuit du 27, pour tenter de venir en aide aux "naufragés" de l'autoroute (157 trains Nord/sud et 200 trains Sud/Nord ont pu circuler). Mais le train roule... Certes difficilement dans les premières heures, mais rapidement un minimum de circulation est rétabli. Les trains de voyageurs assurent quasiment leurs horaires et une priorité est donnée aux trains de produits pétroliers devant ravitailler les grands centres urbains en fuel de chauffage et en denrées de première nécessité. Des trains de matériel de secours sont acheminés de Lyon et Marseille vers Valence. Des trains spéciaux et supplémentaires sont mis en route pour "évacuer" les vacanciers automobilistes ou clients des compagnies aériennes. Quelquefois ils sont arrêtés en pleine voie (certains l'ont baptisé le "trains stop" des neiges) pour permettre aux automobilistes bloqués sur les routes à proximité de quitter le "piège" autoroutier. Ceux qui le peuvent encore conduisent leurs véhicules dans les gares (Orange... chargement sur wagons à marchandises)) ou sur les plates-formes d'embarquement du Train Auto-Couchettes (Avignon), dont le nombre de fourgons porte-autos suffit à peine à absorber le trafic (900 voitures expédiées en 4 TAC d'Avignon vers 50 destinations les 1,3,4 et 5 janvier, 3 000 voitures au total). Les médias se font l'écho des milliers de messages de félicitations et d'encouragements envoyés aux cheminots. Dans le PROGRES de Lyon, un rescapé explique qu'après avoir passé 32 heures dans une voiture gelée, il a pu enfin regagner la gare de Bolléne.: "De Bolléne à Grenoble par le train nous avons encore mis 15 heures. Mais il faut souligner que la S.N.C.F. a fait tout ce qu'elle a pu pour nous venir en aide... les autres, par contre, ils nous ont ignorés...". "Le chemin de fer de grand papa supporte mieux l'hiver que l'autoroute des année 70.!!..". Même si quelques grincheux, certes un peu plus prévoyants que leurs congénères et ayant réservé leurs place à l'avance, ont pesté contre les retards, les trains bondés, les chauffages défaillants; la quasi totalité des passagers ont été heureux de trouver le chemin de fer, conçu en 1855, pour les tirer de ce fort mauvais pas. Une fois encore, aux rigueurs de l'hiver, la S.N.C.F. a opposé des moyens exceptionnels. Alliés à la conscience et au courage des hommes et à une organisation bien rodée, ils permettent au rail de remporter la bataille. Mais ces fervents automobilistes ont ils retenu la leçon? A n'en pas douter, sitôt la neige fondue ils ont repris leurs voyages... en voiture.
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LE PREMIER MINISTRE PARIS le 6 janvier 1971 Monsieur le Président, Je tiens à vous exprimer et à vous demander de transmettre à l'ensemble des cheminots mes félicitations personnelles et celles du Gouvernement, pour la façon dont la S.N.C.F. a contribué, par le dévouement et l'efficacité de ses agents, à résoudre une partie importante des problèmes de transport qui se sont posés en raison des grands froids, au cours de ces derniers jours. L'effort considérable accompli par les cheminots et qu'ils continuent à mettre en oeuvre, a frappé l'opinion publique et, pour ma part, j'ai pu mesurer à quel point il a été précieux. Je vous prie d'agréer, monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués. Jacques CHABAN DELMAS Monsieur André SEGUALAT
MINISTERE DES TRANSPORTS LE MINISTRE PARIS le 8 janvier 1971 Monsieur le Président, Au cours de la période récente, la Société Nationale de Chemins de fer Français a accompli à nouveau un effort remarquable, dans des conditions pourtant encore plus difficiles que d'habitude, pour assurer tous les transports indispensables au moment des fêtes de fin d'année. A l'ensemble des cheminots qui se sont acquittés de cette tâche avec un dévouement total, je vous prie de transmettre mes très vives félicitations et l'expression de ma très grande gratitude. Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de mes sentiments très distingués.. Jean CHAMANT Monsieur André SEGUALAT
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Sur les chantiers des imposants viaducs de la future ligne du T.G.V. sur la Durance, la rivière fait connaître sa puissance dés janvier 1997. A l'attention de ceux qui auraient pu oublier ses légendaires colères elle va fait une démonstration de sa vitalité. D'importantes crues "rongent" sur 250 mètres de long, les pistes construites pour le passage des engins et emportent sans peine dans son lit des buses de plusieurs centaines de Kilos! Pour protéger ses ouvrages et les soustraire à la rivière, la S.N.C.F. doit mettre en place plus de 160 000 tonnes d'enrochements à Cavaillon et 110 000 à Cheval-blanc...!
Fin d'année difficile 2002 sur le front des intempéries. Le 8 septembre au soir, un déluge s'abat sur le Sud Est de la France. Les pluies dilluviennes se poursuivent sans discontinuer et sans faiblir durant de longues heures. L'équivalent de plusieurs mois de précipitations se déverse en quelques heures. Les départements du Gard, du Vaucluse sont les plus touchés par les brusques montées des ruisseaux et rivières. Les terres, les villages et les villes sont noyées. Des centaines d'habitations sont endommagées, plus de vingt personnes trouvent la mort! Les installations ferroviaires ne sont pas épargnées. Les cheminots d'Orange, les hommes de l'équipement, les agents circulation des postes de Sorgues et d'Orange, les chefs de gares, sont surpris par la brutalité et la rapidité du phénomène. Près de Piolenc et Mornas, les ruissellements emportent les terrains, les voies sont dégarnies, les signaux voient leurs fondations mises à nu. Toutes les circulations sont arrêtées ou retenues dans les gares en amont. Le personnel doit alors prendre en charge des centaines de voyageurs en rupture de correspondance ou, pis encore dans l'impossibilité de continuer leur voyage... Pour une durée totalement indéterminée. Une partie des installations d'Orange sont noyées. Le passage souterrain est totalement inondé, ainsi que la salle des relais du poste. L'alimentation électrique doit être coupée et des agrafes posées sur les aiguilles d'entrée des voies de service... Il faut deux jours pour que les installations soient de nouveau fonctionnelles après une longue et minutieuse remise en service. Malgré d'importants retards de circulations enregistrés, la ligne T.G.V. n'est, pour sa part, pas endommagée par cette catastrophe naturelle...
Chutes de neige hiver 2007... Dépôt de Vénissieux (Rhône)
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- Archives INA... Inondations vallée du Rhône 1951.
- Les chutes de neige de décembre 1970
- Bilan économique et social de l'orage du 22 sept 92.
- Chronologie des catastrophes neigeuses dans le sud-est de la France.
- INA les naufragés de la neige dans la vallée du Rhône en 1970.
- Lost in the seventies de la neige dans la vallée du Rhône en 1970.
- Chroniques météo depuis 1850 "de la neige dans la vallée du Rhône en 1970".
- Chroniques météo depuis 1850 Les naufragés de l'autoroute du soleil.
- Compte rendu séances du sénat avril 1971.
- journal La Provence En 1970, ce fut sans doute bien pire qu'en... 2010
- Correspondances ferroviaires N°5.
- Preparation des rames contre le froid.
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- Le trafic par fortes chaleurs
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- La circulation interrompue sur la ligne TGV à cause de la crue de la Durance. (La Provence)
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