AUTORAILS ET AUTOMOTRICES..
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La crise économique de 1929, le développement de la concurrence routière et les difficultés rencontrées par les compagnies vont pousser ces dernières dans les années 30, à rechercher des "solutions" alternatives et meilleur marché pour les dessertes de lignes secondaires. Il coûte en effet bien cher (et pour un résultat très moyen il faut bien en convenir!) de faire circuler des trains "classiques" avec machine à vapeur, voitures (et souvent... wagons!) sur des lignes à très faible fréquentation... Quand bien même le matériel engagé est hors d'âge et de performances plus que limitées! Dans le même temps, les constructeurs de matériel automobile, cherchant également à se diversifier, tentent de se tourner vers le monde ferroviaire pour proposer des adaptations de véhicules routiers.
Du matériel hors d'âge et d'un confort tout relatif est engagé sur les trains mixtes des lignes secondaires... Pour autant les coûts d'exploitation de trains à vapeur restent élevés.
Revenons rapidement sur l'histoire de ces matériels... Qui ont, bien évidemment, emprunté aussi les lignes Vauclusiennes et qui sont rentrés (abusivement...) dans l'histoire pour le commun des mortels, sous le vocable de "Micheline" et dont on n'oubliera pas de si tôt la fameuse livrée bicolore rouge et crème.
Les autorails...
En 1932, le P.L.M. organise un "concours" ouverts aux constructeurs automobiles et ferroviaires afin de faire émerger de nouveaux concepts. Les soumissionnaires sont, cette fois, libres de toute initiative (alors que jusqu'alors c'est la compagnie elle-même qui étudiait voire fabriquait elle-même ses locomotives! Mais le P.L.M. n'ayant aucune expérience dans le domaine des autorails, il décide de laisser l'initiative aux industriels). Le cahier des charges vise à obtenir des engins peu coûteux à l'achat et en entretien, aptes à desservir des lignes secondaires aux arrêts fréquents, de fait les plus concurrencées par le service routier en plein développement (matériel de 3eme classe, 40 places assises et 10 places debout, possibilité de transporter 1 tonne de bagages en fourgon, moteur à pétrole et possibilité de couplage de 2 appareils...).
Le concours se termine par un peu plus d'une vingtaine de commandes pour des engins prototypes qui sont essayés dans diverses configurations et sur diverses lignes par la compagnie. Les résultats de ces tests permettent au P.L.M. tout à la fois de se forger sa propre expérience, mais également de définir le cahier des charges des engins à venir pour les commandes série. Certains autorails sont à essieux, d'autres à bogies, certains sont la transposition simple de véhicules routiers, d'autres sont d'ores et déjà étudiés comme de véritables véhicules ferroviaires... Les solutions techniques proposées sont également très différentes d'un constructeur à l'autre... En tous cas, ces nouveaux engins sont très économiques tout autant en entretien qu'en consommation de carburant... Quand les autorails sont au dépôt, le moteur est arrêté. Contrairement aux locomotives dont le feu doit être conservé même en stationnement, ils ne consomment donc plus rien une fois à l'arrêt! De plus, ils sont opérationnels en quelques minutes alors que les machines à vapeur nécessitent de longues heures de montée en pression...
Autorail SOMUA au dépôt d'Avignon
Très rapidement des autorails "série" sont commandés par le P.L.M. à divers constructeurs et la mise en exploitation de ces nouveaux engins résolument modernes se met en place. Il faut également adapter les infrastructures de certains dépôts pour accueillir les nouveaux pensionnaires, dont l'entretien et le ravitaillement est tout à fait différent de ceux des grandes soeurs au charbon!
Ce qui fût autrefois la remise/ atelier pour les autorails au dépôt d'Avignon. On voit la remise telle qu'elle était encore desservie par un pont tournant... Tout celà a disparu.
A partir de 1936 Avignon voit, dans ce cadre, un centre "autorails" installé au dépôt des locomotives. Un hangar/atelier est spécifiquement construit. Il reçoit en propre une dotation de matériel S.O.M.U.A.* (11 appareils entre 1936 et 1937). Ces engins se chargent des liaisons locales de l'étoile de Carpentras et vers Digne et autres lignes secondaires ou principales. On peut aussi apercevoir en Avignon des autorails RENAULT VH et ABJ, qui circulent vers l'Isle, Cavaillon, Miramas et Nîmes... En 1937 le centre d'Avignon absorbe le centre Toulonnais et récupère sa dotation de VH Renault.
Autorail SOMUA assurant la desserte à Sorgues...
Ancien autorail Renault VH... réutilisé sur les chemins de fer d'Anduze à St. Jean du Gard.
Autorail X 2400 attelé à une rame de voitures à portières latérales très anciennes et un double autorail Bugatti (3eme classe) de passage à L'isle/Sorgue en 1949.
Mais sur les voies Vauclusiennes, il est également possible de croiser, suivant les époques, des BUGATTI du dépôt de Nice et d'autres autorails.
L'expérience est de courte durée. Les premières lois de "coordination" rail-route enlèvent le trafic voyageur sur plusieurs lignes... Et donc le besoin d'autorails. Puis, l'entrée en guerre provoque rapidement une pénurie de carburant qui conduit à garer les autorails sous la remise.
Revue "Bulletin P.L.M."
Autorail de la Croix Rouge au milieu des décombres du dépôt d'Avignon en 1944
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Au sortir du conflit et dans les années 50 le trafic autorail renait, même si au départ l'accès aux trains reste "règlementé", faute de places et de matériel disponible. Certains aimeraient d'ailleurs bien, à cette occasion, que ces nouveaux engins, souples et économiques, soient (ré)utilisés sur les lignes naguères coordonnées voire pour sauver les lignes en péril d'Orange au Buis et de Pierrelatte à Nyons. Mais il n'est déjà plus dans l'air du temps de laisser "survivre" les lignes secondaires... L'heure est à des économies plus "drastiques". La ligne métrique de l'OLB et la Pierrelatte-Nyons succombent donc sous les coups de boutoir des chantres de la rentabilité à tout prix, dans une quasi indifférence... Elles n'auront finalement jamais vu circuler des autorails...
Le rayon d'action des appareils avignonnais atteint pourtant alors Montpellier, Nîmes, Marseille, Le Teil, Veynes, Grenoble, Digne, Narbonne et même Aix en Provence et Toulon! Les autorails peuvent être engagés en Unités multiples ou en couplages avec d'autres types (avec parfois une "esthétique" peu réussie) ou attelés à des voitures ou des remorques spécifiques. Les 9 SOMUA (2 ont été détruits lors de bombardements) d'Avignon commencent à être radiés en 1959, mais 5 exemplaires figurent toujours aux roulements en 1960. Ils commencent à être âgés et sont souvent remplacés par des engins "unifiés", X 3800 "Picasso" plus modernes et plus performants. Peu à peu l'activité des anciens autorails d'origine P.L.M. s'étiole puis s'éteint totalement.
L'autorail pourrait-il encore sauver la petite ligne du Buis?
Il ne circule bientôt que des "caravelles" X 4300 ainsi que quelques RENAULT X 4200 ("panoramiques") ou X 3800 de Marseille mais le dépôt d'Avignon qui possède un contingent d'automotrices Z 7100, n'a plus en propre la gérance d'autorails.
Arrivée d'un autorail avec 3 remorques en gare d'Avignon dans les années 50.
Passage d'un autorail panoramique en gare de Cavaillon lors d'un voyage spécial du COPEF en 1983. Un style résolument moderne et des solutions technique d'avant garde sur cette série de magnifiques engins!
Les automotrices...
Une brochure S.N.C.F... On aperçoit des automotrices sous la rotonde et une RGP sur le tour de reprofilage des roues.
Avec l'électrification de la ligne impériale arrivent en Vaucluse les automotrices électriques de type Z 7100, puis Z2. Le développement de l'offre TER et la modernisation du matériel des années 2000 nous permettent de trouver maintenant sur le réseau des rames X TER, T.E.R. 2N, ainsi que des autorails à grande capacité... Mais Avignon, reçoit également en transit, dans les années 60/70, les automoteurs diésel T.E.E. Ligure ou des RGP comme le Catalan ou le Rhodanien.
Automotrice TEE le "LIGURE" à Avignon dans les années 60.
Matériel "moderne" à Avignon, Courthézon...
Attention au départ de la double rame d'automotrices Z2 en gare de Sorgue...
Les accidents d'autorails...
Le 8/10/1958, l'autorail S.O.M.U.A. qui assure la liaison Pertuis-Cavaillon-Avignon, entre en collision avec un train en gare de Cadenet. Il est 8H du matin lorsque ce train, trop long et engageant le gabarit, est pris en écharpe par l'autorail. Malgré l'aspect impressionnant de l'accident, une seule passagère est blessée... très légèrement.
Un accident particulièrement grave est à déplorer au P.N. de Gadagne en 1983. Un autorail y percute un semi-remorque en détresse au milieu des voies. L'accident est spectaculaire mais encore sans gravité. M Henri Corréard âgé de quarante sept ans, mécanicien pilotant l'autorail, quitte alors son train accidenté pour mettre la voie en "sécurité", conformément au règlement. Mais alors qu'il descend sur les voies il est happé et tué sur le coup par un train croiseur. C'est ainsi qu'après avoir échappé à la mort dans la cabine de pilotage il tombe victime de son devoir. Cet homme unanimement reconnu pour sa gentillesse et sa droiture, laisse un grand vide dans la mémoire des ses amis et collègues de travail. Ses obsèques sont particulièrement émouvantes.
En 1984, l'autorail Cavaillon - Avignon n° 7106, transportant à son bord près de cent vingts passagers quitte les rails à Moriéres. Peu de dégâts sont à déplorer, aucun blessé non plus, fort heureusement... Il semble s'agir d'un déraillement du à un acte de malveillance!..
Les temps forts et les circulations autorails spéciales...
A diverses occasions des autorails ont été utilisés pour des circulations "spéciales"... Voici quelques-uns de ces événements.
1955 est l'année de la commémoration du centenaire de la ligne de chemin de fer Lyon-Avignon. Diverses festivités sont organisées au point milieu de la ligne, en gare de Valence. Un train spécial tracté par une antique Crampton est mis en route au départ de Lyon. C'est un autorail qui emporte depuis Avignon les diverses personnalités locales dont MM Daladier, maire d'Avignon, Balester, maire d'Orange, Niel, président du Conseil Général et bien d'autres encore.
La S.N.C.F. est, on l'imagine facilement, une formidable entreprise, forte de plusieurs milliers de cheminots, représentant un nombre incalculable de métiers et spécialités. Beaucoup de ces hommes, oeuvrant quotidiennement sur le matériel ferroviaire, savent trouver de multiples astuces visant à améliorer le service, faciliter le travail de chacun, fiabiliser toujours plus le matériel. Pour ne rien perdre de ces inestimables "inventions" l'entreprise organise chaque année un concours de "suggestions" ouvert à tous les agents. Concours récompensé par des prix variant suivant l'originalité de la proposition ou l'impact économique apporté par celle-ci. C'est ainsi qu'au concours de l'année 1965, M Marc Pélacuer, ouvrier professionnel de première classe au poste d'entretien d'Avignon, reçoit des mains du directeur général de la S.N.C.F. le troisième prix. Ce prix lui attribué pour une suggestion visant à améliorer la sécurité sur les remorques d'automotrices ZR 27200, et à limiter les risques d'incendie liés à certains dysfonctionnement du système de chauffage autonome. Une suggestion qui sera appliquée sur l'ensemble du matériel concerné...
Dans les années 60/70, les sportifs Vauclusiens sont de fidèles clients et ardents défenseurs du rail. Le XV bédarridais ou bien encore les footballeurs de l'Olympique Avignonnais effectuent la majeure partie de leurs déplacements dans des autorails spécialement affrétés... Ambiance garantie!
En 1980 la BB 22318 reçoit les armes de la ville de Carpentras. Une cérémonie de parrainage est proposée en gare. Les officiels invités arrivent par autorail.
L'année 1983 commence sous le signe de la fête. Le 15 janvier, la rame Z 7205 est baptisée Châteauneuf du Pape. Dans le courant de l'année, un autorail panoramique, affrété par le COPEF effectue un périple en Vaucluse. Il circule sur les voies fermées aux voyageurs et même sur la ligne d'Apt fermée à tout trafic peu avant que celle-ci ne soit démantelée. Il se rend également du côté de Pertuis et de Villeneuve les Avignon...
Le 8 juin 1985, la rame Z 7370 est, à son tour, baptisée "Monteux".
Le 28 juin 1986, c'est au tour de la Z 7515, de recevoir les écus Orangeois. C'est alors la troisième automotrice recevant pour patronyme le nom d'une Ville Vauclusienne.
Le 15 mars 1992, un autorail spécial affrété par la société SIFRACO circule entre Aix en Provence et.. Carpentras.
Le 13 mai 2006 un autorail AGC circule entre Avignon et Carpentras...
En juillet 2008 l'autorail X 2403 effectue un périple dans le sud-est de la France. Il circule notamment sur les lignes Vauclusiennes et, en particulier entre Cavaillon et Pertuis... fermée au trafic voyageurs.
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Le retour des autorails à Pertuis...
Le 3/09/2001, la gare de Pertuis voit enfin revenir à elle, après 26 ans d'absence, du matériel roulant pour les voyageurs... Cette fois c'est du matériel moderne qui est appelé à circuler. L'arrivée du premier automoteur X T.E.R. de liaison entre Marseille, Aix en Provence et Pertuis, est saluée par une importante délégation de personnalités; Maire, Conseillers Généraux... Désormais 9 trains viendront chaque jour déposer et pendre des voyageurs à Pertuis, pour les conduire dans le département voisin...
Et... le retour des autorails à Carpentras...
Le 13 mai 2006, le chemin de fer est en fête sur la ligne Sorgues-Carpentras. Une journée d'animations, avec circulation d'un autorail spécial, y est organisée. Cette journée connaît un tel succès populaire que ceux qui y participent ont l'agréable impression de revivre en quelque sorte l'inauguration de la ligne il y a déjà 143 ans! Le projet de réouverture de la ligne au service des voyageurs poursuit son chemin... C'est dans quelques années, après de lourds travaux, que des autorails modernes feront à nouveau la navette entre Avignon et Carpentras.
C'est chose faite le samedi 25 avril 2015. Le premier train en service commercial circule après soixante-dix-sept ans d'attente, deux années de travaux pour la remise en état de la ligne de Sorgues à Carpentras... Ce sont des automotrices bi-modes qui officient, en traction électrique entre Avignon et Sorgues, puis en traction autonome diesel jusqu'au terminus de Carpentras. Le 30 mai suivant, pour le voyage inaugural officiel, c'est une rame du nouveau Régiolis qui est mise en ligne. en attendant que ce matériel moderne soit engagé en service normal sur cette relation.
La ligne de Cavaillon à Pertuis voit également la circulation d?autorails spéciaux. Samedi 04 Mai 2013 c'est l'autorail X 2819 qui a égayé le Luberon de ses coups de sifflets sonores entre Cavaillon et Pertuis. (Une bonne occasion pour rappeler aux élus qu'il est possible de faire circuler des trains de voyageurs sur la ligne !)
En juillet 2015, c'est le passage rapide du train du Veyn'art en gare de Pertuis qui anime un peu la gare.
La "Caravelle" du Veyn'art croise le TER en gare de Pertuis...
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